Memory
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Film de Michel Franco (2023)

Que voilà un beau film, doux, subtil, telle la toujours magnifique Jessica Chastain.

Il faudrait écrire un poème sur Jessica Chastain, je ne prétends pas avoir le talent nécessaire, mais cette peau pâle, ces cheveux fous, roux, qui frisottent sur les tempes, cette allure gracieuse. On s'attendrait à ce qu'un tel port soit celui d'une princesse (bon je sais oui, j'en fais des tonnes), mais elle joue simplement le rôle de Sylvia, travailleuse sociale, enfin caretaker, une dame qui s'occupe de personnes âgées.

Personnage manifestement renfermé, voire barricadé contre la vie courante, comme le montre cette manière qu'elle a de refermer à triple tour la porte, en rentrant chez elle.

Par ailleurs, alcoolique anonyme, avec treize ans d'abstinence, soit l'âge de sa fille, qu'elle élève seule — on ne saura pas qui est le père, du reste.

Un soir lors d'un évènement où on la traîne, une soirée d'anciens de son lycée, et où elle s'emmerde copieusement, elle voit un type s'asseoir à côté d'elle. On ne sait pas s'il lui parle, la musique gueule à fond. Elle s'en va, apparemment c'est trop pour elle cette intrusion, mais voilà que le type la suit, la rue, le métro, la rue jusque chez elle.

Elle se barricade, donc, et lui passe la nuit sous sa fenêtre.

Elle vient de rencontrer Saul (Peter Sarsgaard), qui s'avère atteint d'une forme de démence. Il oublie à mesure ; il se rappelle le passé lointain avec exactitude, mais ne peut pas regarder un film parce que, quand on ne se rappelle pas ce qui se passe, hein ; il est donc une figure de l'oubli.

En revanche Sylvia, début d'explication de ce comportement barricadé que j'ai dit, se rappelle avec douleur des attouchements subis à douze ans, de la part de plus grands du lycée.

Évidemment, l'histoire est celle du couple qu'ils vont former. Et de cette lutte entre souvenirs effractants, traumatiques, et oubli involontaire. Leur histoire devient mémorable.

Le reste, à vous de le voir.

Dans mon propos introductif, je disais que ce film était "subtil" : les thèmes que j'ai évoqués pourraient être assénés, traités avec de gros sabots ; il n'en est rien, le film se maintenant toujours sur cette ligne de crête où prime avant tout l'émotion, oh, ni une émotion niaiseuse, ni un romantisme échevelé, ni une passion torride d'une brutalité sans bornes, non : une émotion à hauteur d'homme (et de femme), belle et touchante comme un amour inattendu.

Un petit bijou d'équilibre et d'humanité.

Servi par une grande Jessica Chastain, ai-je dit à quel point elle est belle ?

Et un Peter Sarsgaard qui n'est pas mal non plus.

CE VEINARD.

Mathieu-Erre
8
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le 2 juin 2024

Critique lue 20 fois

3 j'aime

Mathieu Erre

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