Mickey 7/10
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le 17 févr. 2025
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Avec Mickey 17, Bong Joon Ho semble avoir perdu la boussole qui guidait ses précédents chefs-d’œuvre. Loin de la finesse narrative et de la maîtrise formelle qui ont fait sa renommée, le réalisateur coréen livre ici un film désordonné, excessif, et surtout, profondément inabouti. Plus encore qu’Okja, qui avait déjà montré des signes de fragilité dans son passage à une production internationale, Mickey 17 sombre dans un chaos visuel et scénaristique qui frôle l’autoparodie. L’humour, puéril tendance scato, tombe à plat, noyé dans un déluge d’effets tapageurs et de séquences surchargées. La salle, témoin impuissante de ce naufrage, ne réagit que par quelques rires timides, vite étouffés par la tonitruante incohérence ambiante.
Le principal écueil de Mickey 17 réside dans son incapacité à choisir une direction claire, le film mettant tour à tour le focus sur l’histoire d’amour, les questions philosophiques engendrés par le dédoublement des Mickeys et la satire sans jamais s’engager pleinement dans l’une ou l’autre des thématiques. Le résultat est un tourbillon d’idées qui, faute de développement, restent à l’état d’ébauches. Pour tenter de donner une illusion de cohérence, le réalisateur recourt à une narration omniprésente, sursignifiante, qui alourdit le film plus qu’elle ne l’éclaire. Cette surcharge verbale, loin de combler les lacunes du scénario, ne fait qu’accentuer le sentiment de confusion.
Mais ce qui frappe le plus, c’est l’absence totale de chair dans les personnages. Aucun d’eux ne parvient à exister véritablement à l’écran, réduits qu’ils sont à de simples archétypes ou à des faire-valoir grotesques. La relation entre Robert Pattinson et Steven Yeun, par exemple, qui pourtant propulse le récit en début d’intrigue, manque cruellement de crédibilité, de poids et d’alchimie. Leurs interactions sonnent creux, comme si le film lui-même doutait de leur nécessité. En voulant tourner en dérision toute forme de dramaturgie classique, Bong Joon Ho finit par annuler toute possibilité d’empathie ou d’engagement émotionnel. Mickey 17 devient alors une succession de séquences vides, désincarnées, à l’image des pires productions Marvel.
Ce flottement artistique soulève une question plus large sur le cinéma de Bong Joon Ho hors de la Corée. À l’exception notable de Snowpiercer, ses films internationaux semblent systématiquement perdre la subtilité et l’intelligence qui caractérisent son travail dans son pays natal. Comme si, une fois sorti de son territoire, le cinéaste se laissait emporter par une liberté créative débridée, mais sans garde-fous. Mickey 17 en est l’illustration la plus flagrante : derrière son ambition démesurée et son énergie visuelle, le film peine à trouver un véritable ancrage, laissant un goût amer d’inachevé.
En définitive, Mickey 17 est moins un film qu’un bac à sable géant rempli de dollars où Bong Joon Ho semble s’être perdu. Entre excès formels et légèreté conceptuelle, il échoue à captiver, à émouvoir, ou même à divertir. Un constat d’autant plus triste que l’on sait le talent immense de son auteur. Espérons qu’Hollywood n’est qu’une parenthèse, et que le réalisateur saura retrouver la voie qui a fait de lui l’un des cinéastes les plus passionnants de sa génération.
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il y a 3 jours
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