Daniel (Ange Dargent) pourrait être un élève de 4ème comme beaucoup d’autres. Seulement voilà, il est petit pour son âge (d’où son surnom de Microbe), passe régulièrement pour une fille, rechigne devant un téléphone portable et fait un blocage viscéral vis-à-vis de Shakira. Son nouveau copain Théo (Théo Baquet), fort caractère et répartie aisée, est vite surnommé Gasoil, parce que c’est un bricoleur qui n’hésite pas à mettre les mains dans le cambouis et parce qu’il se promène avec une mobylette sur laquelle il arbore un boîtier de son cru qui lui permet d’émettre des sons improbables.


Le boîtier en question est révélateur du film. C’est le genre d’objet que les jeunes bricolaient il y a 20 ans sinon plus. Et puisque Théo est un bricoleur, son invention de « génie » sera une voiture (celle qu’on voit sur l’affiche et dans la bande-annonce), bientôt adaptable en maison grâce à l’apport de Daniel. L’objet, instrument de leur liberté, est bricolé avec un sommier, un meuble déglingué, une porte, un hublot de machine à laver, etc. Locomotion avec un moteur 2 temps de récupération. Tout cela n’est pas léger-léger et donc cette voiture-maison se comporte exactement comme la coquille d’un escargot. Elle protège mais n’avance qu’à vitesse réduite. Dialogue en situation :


Théo : Et si on poussait jusque Nemours ?
Daniel : Si c’est toi qui pousse, ça me dérange pas
Théo : Non, je plaisantais, je disais qu’on pourrait aller jusqu’à Nemours.
Daniel : J’avais compris (nous aussi).


On s’attendrait presque à ce que Daniel réponde plutôt « Théo t’es lourd ! » Il s’avère également que les deux amis ne sont pas tout-à fait d’accord sur leur destination. Théo voudrait retrouver un site où il a d’excellents souvenirs d’une colonie de vacances. Daniel envisagerait bien, en douce, d’arriver sur le lieu de vacances de la mignonne Laura (Diane Besnier), qui lui a laissé négligemment son adresse avant de partir en vacances, alors qu’elle avait refusé de danser avec lui à la soirée de fin d’année.


Bien qu’ils avancent doucement, nos deux voyageurs vont enchainer les péripéties et mésaventures. Ils vont également se chamailler un peu, parce que, la promiscuité ça s’apprend.


Après une adaptation en demi-teinte de L’écume des jours et un budget assez important, le français Michel Gondry revient ici à ses premières amours, soit le cinéma fantaisiste, avec un budget resserré et beaucoup de bricolage. Selon un principe personnel (on n’est jamais si bien suédé que par soi-même), le réalisateur (et scénariste) montre une histoire qui ressemble singulièrement à des souvenirs de jeunesse. Bien entendu, il est fort possible que ce soient des fantasmes illustrés de quelques situations réelles ou enjolivées (une roue, invention géniale s’il en est, avec un enjoliveur ça fait toujours mieux). Le film est donc agréable, sympathique, souvent rigolo (surtout si on apprécie l’humour potache), mais pas exceptionnel non plus.


Précisons que Microbe et Gasoil vont au collège à Versailles, banlieue très BCBG, même si les milieux sociaux des 2 ados ne sont pas spécialement huppés. Le milieu de Daniel est le plus détaillé (Gondry s’identifie davantage à lui qu’à Théo), son frère se la jouant punk avec ses copains (bel enchainement de gags avec le trou pratiqué dans un mur de la chambre qui donne sur le jardin). On voit surtout la mère (Audrey Tautou), légèrement dépassée mais très curieuse et ouverte à tous les sujets, y compris la sexualité de Daniel (que cela agace au plus haut point). La naissance de l’amitié entre Daniel et Théo est bien montrée. Par contre, on peut douter que le film se passe à notre époque, jusqu’au moment où on voit Daniel sur un terrain de foot avec un maillot au nom d’Ibrahimovic. Belle séquence au passage, avec en point de mire le mime d’une action décisive au ralenti.


Un des mérites du film est de ne pas cantonner les personnages à Versailles. Il aurait été tellement simple de les laisser bricoler tout l’été, pour s’apercevoir qu’ils n’avaient pas les moyens de leurs idées. Par contre, le scénario traite de façon très légère (à l’exception de la conception du véhicule), toutes les étapes qui permettent de partir pour de bon. Et les réactions parentales, une fois la « fugue » de leurs enfants réalisée sont incroyablement molles. La circulation sur nos routes de campagne est l’occasion de quelques scènes humoristiques, mais on n’atteint jamais les sommets de burlesque qu’on pouvait espérer. A propos de sommets, les ados comprennent qu’ils ont intérêt à les éviter pour ménager leurs forces. Gagneront-ils au change en arrivant à Auxerre ? Pas sûr. Quelques surprises les attendent en cherchant un coiffeur dans la cîté bourguignonne.


Même s’il sort au bon moment (les vacances scolaires, comme dans le récit), c’est plutôt culotté de proposer un film relativement simple dans sa forme, alors que les grosses affiches du moment font dans les effets spéciaux numériques. Michel Gondry utilise les effets de façon bluffante (atterrissage d’un avion à l’envers), mais son truc c’est plutôt les bricolages maisons.

Electron
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le 7 juil. 2015

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