Dix neuf ans après sa sortie japonaise, Millennium Actress est projeté sur nos écrans français sans prendre une seule ride. Satoshi Kon offre une oeuvre d’une maîtrise cinématographique folle et intemporelle : autant dans son style d’animation que dans sa dramaturgie complexe et fluide à la fois.
Un duo de journalistes souhaite interviewer la grande actrice Chiyoko Fujiwara. Plus qu’un banal récit de carrière, elle délivre un témoignage sincère autour de l’énigme de sa vie. Entre scènes de tournage et scènes de vie, nous sommes enfouis au fin fond d’un tourbillon scénaristique. La course effrénée de cette femme à la recherche d’un amour inconnu oscille entre fiction et réalité. Il n’existe plus d’espace-temps dans ce conte enchâssé où passé et présent ne font qu’un.
Le sujet du cinéma, ainsi que son champ sémantique, sont habilement empruntés pour mettre en relief ces trois personnages. Kon crée une réalité alternative dans laquelle sont plongés les intervieweurs, et nous-mêmes, spectateurs, par la même occasion. L’envergure de la trame narrative aboutit à un rare bijou de cinéma.
Outre cette prouesse d’écriture du fond, ce qu’il se passe devant nos yeux est ambitieux. En effet, Kon se saisit du pouvoir des souvenirs de sa protagoniste pour construire un spectacle visuel innovant :
rappelons nous le moment où Chiyoko court de scènes en scènes et où les transitions sont d’une intelligence dingue (extrait).
Le tout soupoudré d’une très belle bande-originale dirigée par Susumu Hirasawa.
Millennium Actress est un film immense et puissant qui, je pense, a influencé les cinémas du monde entier.