Voici un film écrit et réalisé en 1973 par Michael Crichton, qui n'a pas pris une ride cinquante ans après. Lorsqu'on regarde Westworld aujourd'hui, on se dit que Terminator, Blade Runner et d'autres films se sont bien inspirés de certains concepts développés par Crichton.
Bien sûr aussi, on reconnait dans Jurassic Park une certaine continuité intellectuelle de l'auteur en termes de maîtrise de l'homme sur la nature ou sur la technologie qui est le sujet de Mondwest.
Les films Westworld et Jurassic Park procèdent d'ailleurs du même type de construction. Les deux sont des parcs d'attraction absolument "formidables" construits pour le plaisir (ou les fantasmes) du public et accessoirement pour pomper un max de fric aux gogos. Dans les deux cas, les parcs vont se transformer en pièges infernaux et en cauchemar.
Mais Mondwest conserve une dimension supplémentaire très originale.
En effet, le parc d'attraction permet au quidam, pour la modique somme de 1000 dollars par jour (en 1973) de vivre la vraie vie du far west (ou de la vie de château au XIIème siècle ou de la vie dans la Rome Antique). Mais ce qui est surtout développé dans le film, c'est la vie au far west. Partant du postulat que les intervenants du parc sont tous des robots sophistiqués, plus vrais que nature, conçus pour laisser le dernier mot au client et de ne pas le blesser, il n'y a plus aucune limite à la gêne. Comme on sait "dans la gêne, il n'y a pas de plaisir" … Là, intervient quelque chose d'important et d'intéressant car c'est une chose de voir au cinéma, le cow-boy sortir son flingue et abattre froidement le malotru. Le spectateur sait qu'il s'agit d'acteurs et de tirs à blanc. Là, le touriste a l'autorisation implicite de se défendre contre l'agresseur avec une véritable arme mais le geste n'est pas si banal. Et quand il finit par flinguer et qu'il voit le sang jaillir du robot, il est assailli par un doute affreux : "c'était bien un robot, hein, que j'ai descendu ?"
Un autre point intéressant est la typologie que Crichton imagine pour ces clients du parc. Il y a bien sûr le simple amateur de westerns qui va vouloir se faire plaisir à vivre en totale immersion ces aventures (le saloon avec les pépées, l'alcool à gogo, l'attaque de la banque, etc …) comme d'autres passeraient leurs vacances à s'emmerder à faire de l'escalade dans l'Himalaya. Mais il y a aussi le frustré minable ou le couard de la vraie vie qui va enfin se sentir quelqu'un d'important et puissant à pouvoir flinguer des cow-boys (robots) ou pouvoir se taper une entraineuse (robot) du saloon.
Et puis, le troisième point remarquable de ce film, c'est qu'à force de subir et à force d'apprendre des vicissitudes de leur existence, les robots finissent par échapper au contrôle des gestionnaires du parc avec les ravages qu'on peut imaginer. Une autre façon de le dire, c'est que la technologie de ces robots est tellement sophistiquée pour bien ressembler à l'homme, qu'on peut finir par être dépassé par des réactions imprévisibles. C'est un débat (philosophique) fort intéressant qui a le mérite d'être lancé dans Mondwest et qui fera l'objet de bien des développements ultérieurs au cinéma.
D'un point de vue casting, le film est rendu inoubliable par la prestation de Yul Brynner dans le rôle du robot au regard glacé qui va finir par se rebiffer après avoir été flingué et réparé un certain nombre de fois …
Le film est un véritable choc quand on le regarde la première fois d'autant plus qu'il est assez court laissant une certaine part à l'imagination du spectateur ; on peut regretter toutefois que cette petite durée ne permette guère d'approfondir les différents personnages du film.