Moonage daydream est un biopic musical consacré à la star musicale Britannique David Bowie, disparue le 10 janvier 2016. Le seul biopic tourné sur l'artiste à ce jour et sans son autorisation était Velvet Goldmine de Todd Haynes (1998). Ni Bowie, alors en quête de respectabilité, décrit comme un manipulateur satyriasique (interprété par Jonathan Rhys-Meyers), ni Iggy Pop (interprété par Ewan Mc Gregor) n'avaient d'ailleurs apprécié qu'on leur prête une relation homosexuelle durant le film....L'utilisation de prête-noms n'avait rien changé à l'affaire.
Réalisé par Brett Morgen, Moonage daydream, précédé d'une bande originale séduisante, est sorti le 21 septembre 2022 en France.
Même si le film commence au son d' Hallo spaceboy (1997), son déroulement est vaguement chronologique, le réalisateur superposant parfois, ça et là, pour un même titre, des images plus anciennes (Tournée Ziggy Stardust (1972)) et d'autres bien plus récentes.
Cette expérience sensorielle , élégamment réalisée et trés colorée, qui propose des images d'archives, extraits de concerts, de films est presque en permanence commentée par la voix du chanteur racontant son évolution musicale, l'ambiance familiale qu'il a connu enfant, sa mère lointaine, et son demi frère Terry qui finira interné, diagnostiqué schyzophrène. Il explique également son processus créatif et son rapport à la mortalité. Bowie était interprète et compositeur mais également acteur, peintre et sculpteur.
On distingue lors de ce long monologue de plus de 2 heures combien Bowie, totalement autodidacte lors de ses débuts est parvenu à maturité, a digéré et fait siennes les influences culturelles originales, diverses et variées (Crowley, Burroughs, Nietzsche...) qui ont jalonné sa carrière et l'ont construit en tant qu'artiste. Artiste nomade qui puisait son inspiration dans les villes où il s'installait temporairement (Los Angeles, Berlin Ouest...), David Bowie fut longtemps, de son propre aveu, détaché des contingences matérielles.
Coté images, les Bowie-philes ou Bowie-vores attentifs ne trouveront pas "grand chose de neuf à se mettre sous la dent" compte tenu du nombre d'images inédites mises en ligne sur les réseaux sociaux depuis la mort du Thin white duke le 10 janvier 2016. Parmi les images vraiment inédites du film, on voit Bowie déambuler dans un pays du sud est asiatique durant la période Let's dance (1983), descendre des escalators, fumer une cigarette dans un sous sol commercial ou entrer dans un club ainsi qu'un début de session d'interview d'Halloween Jack dans le hall d'un hôtel en 1974....
Il n'en demeure pas moins que les conditions de diffusion du documentaire sont ici optimales, tant sur le plan de l'image, parfois retravaillée, que du son .
De Nietzsche à la positive attitude
Le documentaire est à l'image de la vie artistique de l'artiste et de ses contradictions: parti d'une citation de Nietzsche rappelant que "l'homme avait tué Dieu et invitant les hommes à devenir des surhommes", revendiquant son goût pour le chaos, la transgression à tous les niveaux, l'isolement comme vecteur de création artistique et une musique novatrice et radicale , David Bowie était l'homme venu d'ailleurs.
L'artiste a choisi d'embrasser la positive attitude au début des années 80. A cet instant précis, son discours devint moins convaincant. C'est un fait qu'à partir de 1983, Bowie produira des objets culturels plus mainstream, plus (Outside, Hours) ou moins inspirés (Tonight en 1984, le naufrage Tin machine). Il épousera le mannequin Iman en 1993. En cela, les années 80 auront été aussi rémunératrices pour les artistes que dépourvues de respect pour le public, rassemblant dans des hippodromes ou des stades plusieurs dizaines de milliers de spectateurs parqués comme du bétail devant des écrans (Serious Moonlight tour, Glass spider Tour....) mais sur ce plan, Bowie n'est qu'un exemple parmi d'autres dans cette quête de l'appât du gain. Avec cette nouvelle orientation musicale durant laquelle l'artiste continuera à se chercher jusqu'à sa mort, Bowie troquera son fidèle public d'ultras et de connaisseurs contre un public de masse peu exigeant. Je me souviens des sifflets de la foule et des jets de canettes pendant la première partie de The Cult en 1987 (Glass spider tour au parc de la Courneuve en 1987) alors que cette même foule avait réservé un tonnerre d'applaudissements à Johnny Clegg....(Sic!)
Moonage daydream est d'abord et avant tout un hommage à David Bowie, piloté par lui même. Le film souffre quelque peu d'être un portrait excessivement flatteur, l'absence d'analyse et de contradiction étant patente durant tout son déroulement.
Si David Bowie vous intéresse, vous apprendrez beaucoup plus sur cet artiste exceptionnel -et sa part d'ombre- en lisant l'une des nombreuses biographies qui lui sont consacrées, notamment celle écrite par David Buckley, David Bowie, une étrange fascination .
https://www.senscritique.com/livre/David_Bowie_Une_etrange_fascination/403325
Trailer
Ma note: 7/10