Je tiens avant tout à m'excuser pour le titre (c'est pas vrai je regrette rien) mais j'étais obligé.
Je suis allé voir cette deuxième adaptation du mythe Poirot par Kenneth Branagh avec beaucoup d’appréhension.
En effet son premier essai : « Le Crime de l’Orient Express » en 2017 m’a vraiment laissé de marbre.
Malheureusement l’avis est loin d’être objectif dans mon cas puisqu’il souffrait à mon sens de la comparaison avec une autre adaptation, et surtout de mon attachement nostalgique à ce récit et au personnage.
Mais en demandant à des personnes n’ayant jamais vu/lu l’histoire originale, il en est ressorti que le film était effectivement un cafouillage pour certains.
Soit. Laissons sa chance à Branagh et voyons ce que celui-ci a à offrir avec ce « Mort sur le Nil ».
Visuel :
La première chose qui m’a frappé, c’est la photographie. Le film est beau. C’est coloré, chatoyant, les jeux de lumières sont splendides ; en définitive, la « pellicule » est empreinte de la beauté de l’Egypte.
En parlant d’image, la mise en scène, elle aussi, est à saluer. Le cadre est toujours millimétré lorsqu’il présente ou informe, grandiose quand il contemple et intimiste lorsque les personnages s’expriment.
C’est une réalisation très maîtrisée, sans grande audace je le reconnaît mais qui fonctionne pour ce qu’elle propose.
Pour le moment le film m’avait séduit, c’est un régal pour les yeux. Mais ça ne fait pas tout.
Poirot :
L’un des aspects qui avait « sauvé » le précédent film à mon sens est l’adaptation non pas du crime mais du personnage principal : Hercule Poirot.
Pour moi Kenneth Branagh a compris son sujet et, alors qu’il expérimentait encore dans le premier volet, on sent que dans ce « Mort sur le Nil » il est bien plus à l’aise dans son interprétation.
Poirot est authentique de bout en bout et laisse enfin sa personnalité s’exprimer.
La séquence d’introduction n’y est sans doute pas étrangère. Bien que purement fonctionnelle, elle donne les clés nécessaires à une plongée plus intime dans la compréhension du personnage d’Hercule.
Il devient humain, dévoile forces et faiblesses, qualités et défauts, et s’encre ainsi dans un personnage réel et attachant loin d’être caricatural.
Je salue une fois de plus l’effort de Branagh qui, comme dans « Le crime de l’Orient Express » fait comprendre au monde entier qu’un francophone manie aussi bien les subtilités de la langue anglaise qu’une truite les principes fondamentaux de l’escalade.
Acteurs :
Dans l’ensemble j’ai trouvé les performances du casting assez uniforme, je n’avais d’ailleurs pas grand-chose à reprocher au précédent film sur ce point non plus.
Mais je profite de cet aparté pour souligner la prestation d’Emma Mackey qui m’a vraiment bluffé, je n’ai pas eu beaucoup d’occasion de la voir à l’œuvre auparavant mais ici elle délivre un jeu très convaincant.
Kenneth joue tout en justesse et en émotion, Gal Gadot fait ce qu’elle a à faire mais sans plus, et Armie Hammer est assez effacé jusqu’à la fin du film.
Enquête :
C’était le gros point noir du « Crime de l’Orient Express » à mon sens. L’enquête était brouillonne et les conclusions de Poirot pas très compréhensible (même en sachant la fin je me demandais comment il avait compris).
Mais ici le tir est corrigé et à merveille.
Le film trouve son rythme très rapidement et les éléments de l’enquête se dévoilent avec parcimonie jusqu’au point culminant où toutes les pièces du puzzle s’assemblent.
Je ne sais pas si la conclusion est évidente si l’on ne connaît pas le dénouement à l’avance, mais j’ai trouvé que le film laissait suffisamment d’indices à ses spectateurs pour « participer » à la résolution de l’enquête aux côtés de Poirot.
On ne se sent pas largué loin derrière l’esprit incroyable de Poirot mais la distance est suffisante pour comprendre pourquoi il est entouré de son halo de légende.
La réunion finale, durant laquelle Poirot exprime ses conclusions avec colère et rythme de parole si élevé que les sous-titres n’arrivent plus à suivre, est d’une intensité remarquable, tant pour le personnage d’Hercule que pour son assistance qui voit ses secrets mis à nu et qui finalement révèle le fin mot de l’histoire.
Cette conclusion s’achève sur une note douce/amère pour notre détective qui sera définitivement passé par beaucoup d’émotions enfouies durant ce métrage.
C’est ce tiraillement qui, pour moi, manquait à la fin du précédent opus et qui, ici, donne beaucoup de profondeur au personnage.
On a en prime droit à un épilogue qui fait retomber toute la pression et qui offre un repos bien mérité au détective.
Conclusion :
Dans l’ensemble j’ai été très séduit par ce film, d’autant plus que mon attente était si basse.
Je reconnaît que Branagh a fait ses devoirs depuis sa précédente expérience : il a compris ce qu’est Poirot (en tout cas je suis d’accord avec son interprétation) et il en a profité pour peaufiner le visuel et la mise en scène pour offrir une expérience rythmée, belle et émotionnelle.