Mother Land
5.6
Mother Land

Film de Alexandre Aja (2024)

Les esprits chagrins diront qu’Halle Berry devait passer son chemin quand un réalisateur français lui propose un premier rôle (Gotika de Kasso, Catwoman de Pitoff, et Mother land pour aja), mais des esprits encore plus moqueurs répondront aux premiers que sans ces “bougs”, elle aurait encore moins de rôles à se mettre sous la dent.

Nouveau long métrage d’Aja, et nouveaux sentiments contrastés pour un type qui avait signé un début de carrière très prometteur. Le fils Arcady sait tenir une caméra, il a compris et maîtrisé les impératifs hollywoodiens, mais surtout, il sait éviter les écueils qui font tomber bon nombre de collègues dans la catégorie artisan nanardeur (Xavier Gens) ou poseur esthétique de l’horror Fémis (Grave, le truc avec les grillons tueurs). Capable de synthétiser en 1h30 deux trois idées de films qui ont été faits avant sans tomber dans le (trop) ridicule, mais sans pour autant proposer un film ébouriffant.

Aja est capable de tellement mieux, mais il semble se heurter à un plafond de verre. Il est appliqué, maîtrise son pré carré de faiseur horrifique, mais n’a pas les tripes pour aller proposer un classique 100 % original. C’est à croire qu’à force d’avoir réussi des remakes compliqués, il n’a pas engrangé assez de confiance en lui pour s’écarter d’un terrain balisé, qui a déjà fait ses preuves sur le public.

On a rapproché, à raison, sa dernière livraison de Bird Box, Sans un bruitLe Village, et cabane in the woods de N.Shyamalan, pour le côté vase clos campagnard, et pour ses thèmes : la famille, la foi qui doit être aveugle ou ne doit pas être et le Mal. Thèmes au centre de l’œuvre de “Nighty”. Mais c’est plus à “Emprise” de Bill Paxton que j’ai pensé, dans lequel un père se met à tuer des gens parce qu’une vision céleste lui dit de le faire. Il fait tout pour entraîner ses enfants dans sa mission sacrée, et les deux bambins en profond désaccord sur le diagnostique (papa, est-il est un fou ou un génie ?), ne partagent pas tous, la foi pour cette peine de mort anticipée. Le spectateur étant placé au choix dans la peau d’un des deux enfants.

Dans Mother Land, June (Halle Berry), harnache ses gosses à une corde dès qu’ils doivent sortir de la turne pour cueillir le repas, constitué d’insectes et d’écorce d’arbre, car le Mal rôde autour d’eux, mais semble incapable d’approcher la maison en raison d’un bois sacré protecteur dont serait fait la baraque.

Évidemment, seule June voit la menace, et les enfants doivent croire sur parole leur génitrice. Le monde est foutu, et c’est le seul endroit “vivable” sur terre - si l’on considère qu’être fringué chez Guerrisol, se sustenter de fœtus de renards et tenir la crasse corporelle absolue pour couche de vêtement à part entière soit vivable. Et là aussi, le spectateur croyant que June a besoin d’une consultation serait placé dans la peau de Nolan, tandis que le spectateur mystique penchera pour Samuel. Le film repose grandement sur les performances des deux enfants et de Percy Daggs IV en particulier (notons qu’il est même plus performant que Percy Daggs III ou II).

Le recours à ce suspense/croyance pour captiver le spectateur est risqué, étant donné qu’à la seconde même où la révélation s’effectue, la tension retombe et l’intérêt du film également. C’est un problème auquel s’est heurté de trop nombreuses fois Shyamalan. Il faut avoir des cartouches en réserve pour continuer à impliquer le spectateur, et Aja n’en a pas. La dernière partie de film est assez convenue

Une baraque en bois ne peut que brûler, la trappe dans laquelle June enferme Nolan ne peut que servir à emprisonner le Mal...

C’est peu dire que Mother Land n’en a pas


Car si June avait raison au sujet du Mal, elle avait tort au sujet de la fin du monde

Et ce qui apparaît alors en creux, c’est que toute l’histoire qu’elle a vécu avant le début du film semble bien plus intéressante que ce qui nous est proposé dans Mother Land (le meurtre de son mari et de sa mère ) bref de la matière pour un préquel en cas de petit succès au box-office ?

Mother Land a le mérite de ne pas être un film d’horreur dans l’air du temps, pas de jumpscare ou de violence gratuite et outrancière. Une sobriété qui invite à l’indulgence. On peut même se demander si Mother Land est véritablement un film d’horreur. Mais tout en louant cette sobriété, on peut que constater que le film ne provoque pas la même fascination que The Witch.

Ce n’est pas pire qu’un Shyamalan, surtout Trapp étant de bien plus grandes catastrophes, mais cela reste une petite déception... Dépasse-toi Alex et respecte ces règles comme Nolan et Samuel respectent les règles de leur mère :


  • Plus jamais de film avec Mélanie laurent
  • Plus jamais de remake
  • Ne propose pas un rôle déjanté trash à Nicolas Cage
  • Ne fais pas un slasher avec un octogénaire dans le rôle du tueur.
  • Fais un film sur les extra-terrestres, putain.
  • Lâche la corde
Negreanu
5
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le 9 nov. 2024

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