Avec Niagara, Henry Hathaway, grand réalisateur américain mais de seconde classe, faute d'avoir jamais réalisé un chef-d'œuvre, se glisse entièrement dans l'ombre, imposante, c'est rien de le dire, de Hitchcock, sans pour autant jamais en avoir son génie, dans une tentative de copie, inspiration et hommage mêlés.
Son film, tout en suspens, qui se construit par indices progressifs, emprunte au grand Alfred son ton ironique (qui lui vaut de vraies scènes comiques) et tente d'atteindre ses sommets de terreur, concentrant tout le mystère de son intrigue sur l'objet de désir absolu qu'est Marilyn Monroe (rarement autant sexualisée dans un rôle).
Sa mise en scène ultra lisible, presque limpide, empêchera souvent une vraie appréciation de l'énigme, si bien que le spectateur pourra probablement être déçu par cette histoire, finalement bien simple, voire simpliste.
Néanmoins le film est assez renversant esthétiquement, proposant un vrai jeu de caméra et de perspectives, épousant les lignes des architectures, saturant les couleurs, et faisant éclater l'ombre et la lumière ; il y a nettement ici la base du cinéma de De Palma, et de fait celle de Hitchcock, encore lui.
Niagara, film mineur, sans réelle ambition personnelle, demeure tout de même un vrai plaisir de spectateur, un film beau à voir, divertissant, qui prend même par sa fin en mode survival une allure de vrai film d'aventures, impressionnant pour l'époque.
Hitchcock aura le monumental Mont Rushmore (La Mort Aux Trousses, 1959), mais Hathaway aura eu avant lui les monumentales Niagara Falls.