L'Amérique des laissés-pour-compte, dont une part non négligeable de victimes de la crise de 2008, qui survivent en perpétuel mouvement, sans ne plus avoir de véritable foyer sédentaire, juste un véhicule nécessaire pour voyager et pour s'assurer un toit au-dessus de la tête. Tout est indiqué dans le titre. Tout ceci donne l'impression que cela va être un portrait poignant de cette face étasunienne poussée dans l'ombre, qui n'a pas du tout été touchée par ce qui s'appelle le rêve américain, incarnée principalement en un seul personnage. Et ce dernier est en plus joué par l'excellente Frances McDormand. Que demander de plus ?
Ben que la réalisatrice Chloe Zhao pense un minimum à approfondir ce qu'elle filme.
L'ensemble n'a pas d'intrigue vraiment continue, avec un véritable début, un véritable milieu et une véritable fin. C'est une suite de scènes, chacune entre deux ellipses. Bref, c'est un enchaînement de tranches de vie. Pourquoi pas ? Sauf que le problème, c'est que ces tranches ne sont pas bien épaisses.
Pourtant, il y a des thématiques intéressantes et fortes émotionnellement qui peuvent être entrevues. Le travail harassant représenté ici par un des plus puissants symboles capitalistes de notre époque, à savoir Amazon. La solidarité forte qu'il y a entre marginaux. L'éloignement de toute famille aussi bien sur le plan psychologique que sur celui géographique. Les traumatismes du passé qui justifient en partie cette fuite symbolique. La dureté que peut rencontrer une vie de nomade, à l'instar d'une panne de moteur qui bouleverse tout. Tout ça, sauf que ça n'est jamais approfondi. C'est à peine esquissé que paf il faut déjà passer à la prochaine situation, à chaque fois sans exception.
En conséquence, c'est une impression de vide qui règne. Il n'est pas possible d'avoir le plus petit investissement émotionnel avec le personnage principal et tout ce qu'elle vit.
Enfin, il faut signaler tout de même qu'il y a un piano et des violons qui se font entendre à certains moments au pif et qui disent bien quand il faut être trop émotionné. Oui, le genre de BO à deux balles qui cherche désespérément à combler les très grosses lacunes de la chose, mais qui ne fait ironiquement que les accentuer.
Bref, Nomadland est pour moi un ratage multi-récompensé, n'étant pas autre chose qu'une belle coquille (merci immensité des paysages du pays de l'Oncle Sam !) avec rien dedans.