Dans cette adaptation de Nosferatu, Herzog dresse une réinterprétation personnelle du mythe du vampire, inspirée de Murnau et Stoker. Là où l’original déploie l’angoisse, Herzog sculpte la mélancolie et le tragique, transformant Dracula en figure poignante, accablée par une immortalité devenue fardeau. Son comte n’est pas seulement un monstre, mais un être vulnérable, dont la quête d’amour exprime une solitude intense, presque humaine dans sa souffrance.
Visuellement, Herzog opte pour une approche naturaliste, filmant dans des lieux réels, sous une lumière naturelle qui amplifie l’atmosphère glaciale et atemporelle du récit. Les paysages vastes et désolés, alliés à des cadres contemplatifs, donnent l’impression d’un monde silencieux et indifférent, dans lequel Dracula semble un étranger. Les mouvements lents, les silences, et les images longuement posées imprègnent le film d'une mélancolie latente, accentuant la distance tragique entre le comte et l’humanité qu’il désire.
Dans cette relecture, l’amour de Lucy pour Jonathan devient ambivalent, teinté de sacrifice et de fatalité. Ce sacrifice, moins héroïque que tragique, apparaît comme un geste de pitié envers un être condamné. Ainsi, Herzog enrichit l’émotion humaine de son Dracula d’une profondeur insaisissable, où l’horreur côtoie la compassion, faisant de ce film un monument à la fois terrifiant et profondément humain.