Ironie du cinéma, la cathédrale Notre Dame était victime des flammes le 15 avril 2019. Au cinéma, elle prend l’eau depuis le 16 mars 2022. En voulant reconstituer l’évènement et rendre hommage aux héroïques pompiers qui sauvèrent ce qu’ils purent de l’édifice religieux, Annaud signe un film lourd, pesant et parfois même grotesque.
Reconnaissons au moins une chose. Le film est assez spectaculaire et reconstitue fidèlement Notre Dame et l’évènement. On voit des images assez grandioses et rendons hommage au technicien d’avoir su reconstituer le drame, avec moult effets de pyrotechnie. C’est assez impressionnant. Hélas, tout cela est noyé sous les effets.
J’ai personnellement trouvé le filmage franchement pénible. Annaud multiplie les images de drones pour filmer de haut la cathédrale. Le réalisateur abuse à outrance d’effets de mise en scène lourdingue pour souligner l’ampleur de l’incendie et de ses dégâts. On voit fréquemment des pierres tomber au ralenti. Par ailleurs, aussi spectaculaires que soient les images, elles sont répétitives. Annaud mélange maladroitement les images d’archive : la réaction de Macron, les politiciens venus sur place, le JT de TF1, les JT des télés étrangères pour montrer l’émotion mondiale. En venir à réutiliser autant des images télés en dit beaucoup sur la flemme qu’Annaud a eu de vraiment reconstituer l’évènement. D’autant qu’Annaud a reconstitué deux scènes avec des politiques. On voit Donald Trump envoyer son fameux tweet sur les canadairs. Mais la palme du ridicule revient à Anne Hidalgo. Annaud a insisté pour faire intervenir la maire de Paris. On la voit ainsi réagir à la fumée gigantesque qu’elle voit depuis la fenêtre de son bureau. Mais elle a droit à des dialogues ridicules, du style « Il y a de la fumée au loin. Ce n’est quand même pas Notre-Dame ». Il est surprenant que la politicienne est acceptée de dire des répliques d’une telle naïveté. Ce n’est pas avec le film d’Annaud, qu’elle relancera sa campagne présidentielle.
Annaud distille de temps à autre mais avec une certaine régularité des touches d’humour assez consternantes. Il faut voir comment sont représentés les parisiens : ils roulent comme des chauffards, sont agressifs, mais les touristes en prennent aussi pour leur grade. Le guide Italien est habillé avec beaucoup d’élégance, les asiatiques prennent beaucoup de photos, les québécois ont un accent à couper au couteau, ce qui est censé nous faire rire. Ce pittoresque est assez ridicule. Ajoutons le running gag d’une vieille dame qui n’est visiblement pas au courant pour l’incendie et qui appelle sans cesse les pompiers car son chat est coincé sur les toits. Que c’est décalé ! Enfin, certains personnages comme le conservateur sont outrageusement ridiculisés. En effet, il est à Versailles quand l’incendie se déclare. Il est bloqué dans les transports, court comme un personnage d’un film burlesque, ne se souvient plus du code d’un coffre-fort. Annaud en fait un personnage vraiment ballot en opposition aux pompiers.
Parlons-en justement des pompiers. D’accord, ils ont été remarquables, héroïques. Mais fallait-il montrer leur courage, leur détermination, leur honneur avec autant de premier degré ? Cette éloge aussi frontal me semble d’une candeur assez enfantine. Et j’attendais autre chose qu’une admiration de gamin. Honnêtement, ce film, c’est du plomb !