Un film de Nolan est toujours un truc spécial. On sait pertinemment que cela va entraîner des débats sur le fait d’être face à un truc génial ou face à un objet très surestimé. Même un Nolan mineur reste au-dessus du lot, car il y a toujours quelque chose à en tirer.
Celui-ci est, malgré des défauts, plutôt parmi les grandes expériences de cinéma.
Certes le film est bavard, et il pourrait être raboté d’un bon quart d’heure.
Certes, quelques effets appuyés pourraient être évités (la musique qui monte pour nous montrer l’intensité du passage, ça fait un peu cliché).
Mais la patte Nolan s’applique bien à ce genre particulier qu’est le biopic. Raconter le récit de manière déstructurée est plus intéressant qu’une linéarité qui aurait pu être rébarbative.
Le personnage d’Oppenheimer est livré ici avec toutes ses contradictions qui en font tout sauf un héros. Ses actes et ses attitudes intriguent parfois, voire irritent, mais sont malgré tout logiques au vu de sa recherche de probité. Voyant rapidement où peuvent amener ses travaux, il doit composer avec les risques, car c’est le travail de toute une vie. Il n’est jamais attachant, mais on arrive tout de même à comprendre ses motivations.
Les deux premières heures parviennent à nous intéresser à un domaine qui nous est plutôt inconnu (en tout cas, pour ma part) et qui est le coeur même de ce pour quoi il se bat. Et sont orientées vers le climax tant attendu de cet essai en plein désert qui sera le nœud gordien du basculement de notre monde. Nolan le filme de manière viscérale, et on se doute bien que la satisfaction qu’en tire Oppenheimer ne pourra être qu’éphémère.
Cillian Murphy, qui se voit enfin offrir un premier rôle très solide, livre une partition solide et sérieuse, aidé par les autres acteurs qui sont tous au diapason. La distribution va chercher jusque dans des rôles mineurs à l’écran des compositions parfaites.