Un élément m'a frappé après le visionnage du film à savoir: le rapprochement à faire entre ses deux maniaques que sont J Robert Oppenheimer et Christopher Nolan. Les deux se sentent investis d'un "devoir" vis-à-vis de leurs professions respectives. Les deux ont, chacun à leur manière, décidé de s'affranchir de la réalité (Oppenheimer vis-à-vis de la logique de prédation de l'espèce humaine, Nolan des limitations physiques du cinéma en "dur") à travers une rigidité absolue dans leurs méthodes de travail. Les deux sont perçus comme des sortes de "sauveurs" (l'un de l'Humanité, l'autre du cinéma [LOL])... Et au final, les deux doivent faire face à leurs limites en tant qu'individus microscopiques face à un monde infiniment plus grand, qui peut à loisir réduire leur "révolution" à une anecdote triviale: il en sera de J Robert, qui ne sera retenu que comme celui qui a précipité l'Humanité vers son propre anéantissement, là où on se souviendra de Christopher comme de celui qui a démystifié le cinéma, en a cassé la magie pour n'en faire qu'un objet de théorisation, un miroir du propre narcissisme de l'Homme.
C'est peut-être ça qui m'a fait apprécier (à défaut de ressentir) le film: cette espèce d'aveu d'humilité d'un cinéaste jusque là convaincu de son propre génie. Le prix de l'arrogance, la rançon de la gloire pour un réalisateur se rendant compte que ses travaux servent plus à de longs pensums d'universitaires ou à faire débattre les nerds pendant des jours entiers sur la moindre réplique, plutôt qu'à parler des sentiments par lesquels les oeuvres les ont fait traverser.
En définitive, Oppenheimer est peut-être l'un des films de Nolan que j'inclurais parmi les plus intéressants et, vais-je oser l'avouer, l'un de ceux qui touchent une partie de ma sensibilité.