Ça avait l’air beau, raffiné et un brin réfléchi donc, vous pensez-bien, j’ai tenté ma chance avec ce « Passengers ». Or, c’est peu dire si les premières minutes de ce film sont venues confirmer mon intuition. Sobre, élégant, très inventif dans la manière de présenter la bête. Ça ressemblait vraiment à la S.-F. que j’aime : pas tape-à-l’œil, pas brise-neurones… Du spectacle intelligent quoi. C’est bien simple : le début m’a fait penser à un mix réussi entre « Sunshine », « Wall-E » et « Moon ». C’est vous dire ! Seulement voilà, ce film a beau être maitrisé de main de maître en termes de gestion de l’espace, du rythme, de l’atmosphère, il n’empêche qu’il révèle vite une faille un tantinet embêtante : le manque d’audace. Ah ça ! Sur le plan de l’intrigue, il ne risque pas grand-chose ce « Passengers » ! Les étapes par lesquelles le film passe sont au final toutes attendues, et d’ailleurs, elles savent se faire attendre. Alors certes, Morten Tildum, en bon artificier, sait faire lambiner le truc de manière pas trop désagréable si bien qu’au final ça passe quand même, mais bon, tout ça est tout de même bien frileux.
(C’est qu’il faut attendre une demi-heure pour que Chris Pratt réveille Jennifer Lawrence ; puis une demi-heure supplémentaire pour que Jennifer Lawrence apprenne que c’est Chris Pratt qui l’a réveillé ; puis enfin encore une demi-heure supplémentaire pour qu’enfin on se préoccupe des soucis du vaisseau qui, je le rappelle, étaient quand même ce par quoi le film a commencé. Personnellement, j’ai connu plus rapide…)
Pour être honnête, j’étais presque à deux doigts de crier à l’arnaque sur le final, tant tout ça en vient presque à trahir les promesses initialement posées. Parce que l’air de rien, le début de ce « Passengers » nous annonce par sa forme et ses références multiples un film de S-F posé, réfléchi, interrogateur comme savent le faire les plus grands, et pourtant il se délite progressivement vers de l’entertainment basique à base de pirouettes techniques et de ressorts éculés. Pire encore, par sa conclusion, l’intrigue du film se révèle même n’être au final qu’une simple bluette métaphorique sur les choix qu’on fait en amour et en mode de vie, ce qui n’est certes pas déshonorant en soit, mais qui est quand même à mille lieue de ce que l’introduction promettait. Parce qu’on ne me dira pas que l’ami Tildum n’y a pas pensé.
Tout le topo sur le fait que la Terre soit surpeuplée et que « Homestead » se fasse un paquet de tunes à envoyer des gens sur d’autres planètes, on ne me fera pas croire que ça n’a pas été pensé pour amorcer dans notre esprit l’idée qu’il va y avoir tout une intrigue fourbe liée à ça. Ces aspects là ne sont absolument pas exploités par la suite ! Ils ne sont là que pour occuper notre esprit par des promesses qui nous maintiennent en haleine suffisamment longtemps avant qu’on se rende compte de la supercherie.
Ça, perso, pour le coup, je ne trouve pas ça très fair-play, ni vraiment plaisant sur le long terme. Mais bon, comme dit avant, l’ami Tidum maitrise quand même l’exercice et, me concernant, il est malgré tout parvenu à me faire passer la pilule grâce à quelques bonnes idées visuelles survenues sur la fin du film
(Je pense notamment à la scène dans la piscine en apesanteur : très belle et très maligne !).
Bref, au final, certes « Passengers » trompe un peu sur la marchandise et cherche quelques fois à nous la faire à l’envers au niveau de l’intrigue, mais bon, ça reste beau et bien mené. Au final ça se transforme en bon spectacle plutôt agréable. Il faut juste rapidement comprendre qu’on n’aura en fait rien de plus qu’une petite bluette sympathique, joli prétexte à quelques têtes à têtes mignons et à quelques jolis plans sur la plastique de Jennifer Lawrence (à défaut d’avoir un personnage travaillé, au moins a-t-on des courbes raffinées : après tout, faute de mieux, ça se prend). D’ailleurs, en fin de compte, « Passengers » pourrait se résumer à ce à quoi se limitent ses deux acteurs principaux. Ils n’ont certes pas grand-chose à dire ni à faire d’original, mais au moins ils sont beaux à regarder quoi qu’un peu lisses. Mais bon, c’est déjà pas mal non ?