Voir sous les jeux de dupes des filles
Cette adaptation de l’ultime film d’Alain Corneau, "Crime d’amour" (2010), est, dans ses grands axes, plutôt fidèle à son modèle. Les jeux de dupes auxquels se prêtent les deux héroïne l’une envers l’autre sont respectés à la lettre mais, là où l’original s’achevait sur un pied-de-nez cynique, le remake joue les prolongations pour porter le film un cran plus haut dans la manipulation. Une manière d’exploiter au mieux toutes les potentialités d’un scénario qui assume ses invraisemblances.
Car cette histoire de publicitaires, l’une étant l’employée de l’autre, se renvoyant caresse pour caresse et coup bas pour coup bas, n’est jamais vraiment crédible. Et la défense de la subalterne accusée du meurtre de sa boss, est un modèle de manipulation casse-cou comme on n’en voit qu’au cinéma (dans "L’invraisemblable vérité" de Fritz Lang, 1956, par exemple). Mais ces audaces s’amalgament et leur addition se savoure comme un bon roman de gare. L’intrigue tient du soap opera mais la mise en scène la sublime. Brian de Palma se plaît lui même à manipuler le spectateur en jouant sur ses perceptions. Il compose chaque plan de manière à lui faire prendre des vessies pour des lanternes. La scène du meurtre, amenée par un split-screen, en est le meilleur – et le plus flagrant – exemple.
Pour une fois, ce sont les hommes qui sont cantonnés à des rôles secondaires, de faire valoir. "Passion" est une histoire de femmes qui s’admirent, s’aiment (l’homosexualité latente dans le film de Corneau s’exprime ici plus clairement), se détestent et se tuent. Désir charnel, envies de meurtres : tout est une question de fantasmes.