Le réalisateur Alain Cavalier et son acolyte Vincent Lindon s'amusent à jouer les politiciens. Et pas n'importe lesquels puisque le premier prend le rôle du président de la République tandis que le second s'improvise Premier ministre.

Tentant de transcender à la fois les limites du documentaire et de la fiction, Alain Cavalier propose quelque chose d'unique, qui aurait pu être innovant, mais dans tous les cas, qui a le mérite de dérouter le spectateur. Cette espèce de jeu théâtral porté à un cinéma qui en aurait oublié tous ses codes se mue en une sorte de docu-fiction, projet hybride et étonnant.

Mais loin de ces considérations sur la forme narrative du film, ce qui nous intéresse, c'est que Pater devait montrer les arcanes du pouvoir en France, la relation exceptionnelle entre le président de la République et son Premier ministre imposée par la Ve République ainsi que les hommes de l'ombre qui gravitent autour de ces deux principaux décideurs de l'Etat. Le film avait aussi pour ambition de mettre en lumières quelques pistes de réflexion pour la création d'une "Nouvelle Société", pour reprendre les termes de Jacques Chaban-Delmas en 1969, une société meilleure, généreuse, juste et égalitaire.

Pour tout cela, le film déçoit de A à Z. Le film est bavard, prétentieux et vaniteux. Le vaste champ de réflexions qu'on attendait se résume à une feuille de bloc-notes où il n'y ait question que d'une loi qui imposerait un salaire maximum, loi qui monopolise le débat un peu stérile du film. La réalisation est détestable si bien qu'on hésite à arrêter le film au bout de cinq minutes quand la caméra n'a rien eu d'autre à nous proposer que la vision en plan serré des assiettes des deux politiciens qui s'apprêtent à manger. Au niveau de l'interprétation, si Vincent Lindon s'en sort relativement bien, même s'il est peu aidé par des dialogues creux et parfois ridicules, Alain Cavalier agace énormément.

Prétentieux, vaniteux, vide, ridicule, indéfinissable et indéfini par son auteur lui-même, voilà un beau raté. Que les spectateurs aient applaudi ce film pendant vingt minutes à Cannes me paraît ahurissant. Sans doute est-ce là une formalité du festival ? Je l'espère sinon il faudra que je m'interroge sur le sens de l'expression : « art cinématographique ».
potaille
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le 24 janv. 2012

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