Bella Baxter est le fruit d’une expérience faite par un médecin, ou un savant fou, où après le suicide d’un femme enceinte, le corps est recueilli pour transplanter le cerveau de l’embryon dans le crane de Bella. Le médecin va alors élever cette expérience comme ça fille, et ce jusqu’à la surprotection, l’empêchant de sortir et de découvrir le monde. Cela va créer un sentiment de frustration chez Bella, qui, alors qu’elle doit se marier avec un élève du médecin, décide de partir à la découverte du monde avec Duncan Wedderburn, qui lui promet maintes aventures. Le film va alors proposer une quête initiatique de Bella, pour sa liberté mais aussi une quête de sens à sa vie qui va défiler au gré des scènes.
Le film tient donc un propos très féministe dans la manière dont s’impose le patriarcat et comment Bella parvient à s’en extirper. Si le début du film est en noir et blanc lors de l’enfance de Bella, renforçant l’aspect d’enfermement de celle-ci, le film passe alors en couleurs lors de sa fuite avec Duncan. Les teintes sont alors très marquées et les lieux de voyages correspondent à une vision presque fantasmée, dans un monde presque trop grand, qui peuvent renvoyer aux premiers souvenirs d’un enfant lorsqu’il découvre un nouveau lieu. C’est donc le début d’une liberté qui va vite la rattraper tant Duncan va lui rabâcher les règles de bienséances incombant aux femmes, dont Bella n’a légitimement pas connaissance et qu’elle surmontera tout au long du film afin de mieux s’en affranchir.
Puisque le film parle de l’évolution d’une femme, de comment elle grandi et mûri, la découverte et l’appropriation de son propre corps est aussi un sujet important du film qui va donc contenir des scènes de sexe, qui ne m’ont pas paru si nombreuses que ça par rapport à ce dont j’avais entendu parler du film ici et là. Elles revêtent même leur importance. Je dois admettre que je me suis senti pour la première un peu gêné par la différence, disons, d’âge mental entre Duncan et Bella, mais c’est au final pour mieux se débarrasser du personnage plus tard. Car, affranchie du patriarcat, Bella n’hésite pas à dire ce qu’elle ressent, pour le dire trivialement, s’il elle prend son pied ou si elle s’emmerde. Lors d’une scène lunaire, elle ose même reprendre un homme enseignant le don de son corps pour donner du plaisir féminin, dans une vision très homme-hétéro.
Son parcours sera aussi émaillé de plusieurs rencontres, pour la plupart féminines, qui vont lui permettre d’évoluer. Que ce soit une veuve bourgeoise dans une croisière, ou une tenancière de maison close, que l’on pourrait assimiler à Madame Claude, d’autant plus que ce passage du film se situe à Paris. Cette évolution est aussi marquée par la rencontre du compagnon de la veuve de la croisière, qui est décrit par celle-ci comme cynique. Alors que Bella reste encore naïve sur la beauté du monde, il va la confronter aux horreurs de celui-ci et donner à Bella le sens qu’elle souhaite donner à sa vie et les moyens qu’elle est prête à y allouer pour réussir, qu’ils vous plaisent ou non, car après tout, ça ne regarde qu’elle.
Enfin, j’ai trouvé que le personnage de Bella est très bien écrit, et son évolution est très fine durant le film. On ne peut que remarquer à quel point le personnage est différent au début et à la fin, et pourtant, on ses évolutions ne se remarquent pas forcément au fil de l’eau, c’est très fluide. A noter la prestation folle de Emma Stone, qui est tout le temps crédible, de son jeu très enfantin au début qui rend crédible cette femme-nouveau-né, au caractère beaucoup plus affirmé à la fin du film.