Seulement le deuxième long métrage Disney, et déjà un sommet technique difficilement égalable. Bourrée d'inventions de toutes sortes, l'animation est proche de la quasi perfection, à cela s'ajoute l'incroyable maîtrise du dessin, et, franchement, à part Miyazaki en grande forme, on a pas vu grand chose depuis capable de se mesurer formellement à cette oeuvre-monstre. Même le formidable Fantasia qui va suivre ne présente pas un aussi bel ensemble, la faute à un budget colossal, une main-mise de chaque instant sur les moindres détails, et, surtout, grâce au métier, grâce à la formation de nouveaux animateurs envisagée très tôt par le visionnaire Disney... Métier qui se perdra d'ailleurs très vite après sa disparition, entraînant le marasme esthétique dans lequel vous vivez depuis...
A côté de cet exploit incontestable, le film possède plein de défauts. Déjà, la fée bleue est une tâche jetée au visage du bon goût, ensuite, l'histoire est un peu bancale. Du Pinocchio voyou, Disney ne garde qu'un pantin influençable un peu trop naïf. Du menuisier miséreux sacrifiant son veston pour lui acheter son premier alphabet (traumatisme personnel d'enfance), plus de trace, l'arrière plan économique passant au second plan dans une Amérique encore souffrante... Le reste de l'adaptation se tient, le côté Bavière a son charme, d'ailleurs, le village est magnifique, probablement le point fort du film.
Malgré tout, les événements manquent de liant, et même le développement de Jiminy Cricket ne suffit pas à parfaire un ensemble pourtant superbe. La faute aussi à Pinocchio, personnage particulièrement antipathique ici, non pas pour ses bêtises, mais pour sa mollesse et sa fadeur...
Avec ça, une histoire d'une infinie noirceur, avec des personnages tous plus épouvantables les uns que les autres : le gitan, le cocher, le cachalot... autant de méchants abominables qui finiront d'ailleurs impunis... La palme revient bien sûr à notre compère Renard et à son associé de chat sauvage qui parviennent à vendre deux fois le petit monstre de bois pour de belles sommes sans être a aucun moment redevable de quoi que ce soit devant le spectateur...
Un film finalement assez étrange, donc, et très beau qui conserve en outre la lourde morale originelle du conte, mais dont chaque détail est un régal pour les yeux... Figaro est d'ailleurs probablement le chat le plus chat de l'histoire de l'animation.