Que les amateurs de film d'époque soient prévenus, "Portrait de la jeune fille en feu" est avant tout une histoire d'amour, tournée dans des décors très sobres et avec peu de costumes, s'il on excepte les dernières minutes qui ont sans doute englouti une grande partie du budget vêtements... Mais cela n'empêche pas Céline Sciamma de nous livrer une œuvre graphique et très sensuelle.
A travers cette histoire de peintre qui se fait passer pour une dame de compagnie, pour pouvoir espionner sa modèle qui refuse de poser avant un mariage forcé, le film pose diverses réflexions et degrés de lecture. Condition de la femme dans un monde où les hommes sont physiquement absents, mais où leur influence est omniprésente. Relation entre l'art d'observer et de peindre, et les sentiments que l'on essaie de décrypter dans son modèle pour le "mettre à nu"... et qui finissent par trahir les nôtres.
De nombreux éléments intéressants, au milieu d'une histoire d'amour sincère et intense, portée par deux actrices subtiles et impliquées (les seconds rôles n'étant pas en reste !). Mais la force du film doit beaucoup à sa mise en scène de grande qualité. Céline Sciamma construit ses plans comme des tableaux intimes, très bien découpés, avec des éclairages intérieurs intimistes (l'influence de "Barry Lyndon" n'est jamais loin !) et des couleurs très soignées. Devant ce régal graphique, on pardonnera quelques rares touches un peu balourdes.
Si bien que "Portrait de la jeune fille en feu" est une belle histoire d'amour et une réflexion pertinente sur la peinture, emballées dans une oeuvre graphique de choix.