La comédie romantique "premier rendez-vous" s'inscrit dans une sorte de continuité de style avec "battement de cœur".
Dans cette dernière, une jeune fille évadée d'une maison de correction rejoint une école de pickpocket avant de vivre une aventure avec un jeune diplomate.
Ici, une jeune fille s'évade d'un orphelinat pour retrouver secrètement un mystérieux correspondant épistolaire qui se révèle être un professeur dans un pensionnat huppé (à Saint-Cloud) de garçons ...
"Battement de cœur" est tourné en 1939 pendant la drôle de guerre, "premier rendez-vous" est tourné au début de l'occupation par la Continental. Les deux comédies répondent au besoin de réconforter le public dont le moral est en berne.
Dans les deux comédies, Henri Decoin met en scène la sublime (le mot n'est pas trop fort) Danielle Darrieux. Et nous offre dans les deux cas, une splendide chanson chantée par Danielle Darrieux itself. Ici, bien entendu, c'est le délicieux "premier rendez-vous" qui fut un succès indépendant du film.
Dans "Battement de cœur", c'était "Charade".
Le scénario et la mise en scène ménagent quand même un suspense de bon aloi car on se demande bien dans quel traquenard la candide Micheline (Danielle Darrieux) va tomber après son évasion de l'orphelinat. Le rendez-vous "secret" est donné dans un espèce de café - pas du tout glamour - rempli d'hommes accoudés au comptoir et le "mystérieux" correspondant s'avère être un homme de l'âge d'être son père (Fernand Ledoux). Le spectateur connaissant Fernand Ledoux n'est qu'en partie rassuré car, on ne sait jamais, il peut cacher à travers son air doucereux, un être pervers... Quand le couple sort du café, on sent nettement l'air très réprobateur des clients qui voient ce vieux grigou emballer cette petite jeunette.
Maintenant, toujours à propos du scénario, si "battement de cœur" répondait parfaitement à l'attente car l'histoire était en quelque sorte linéaire, on ne peut pas en dire autant de "premier rendez-vous" où apparait un triangle amoureux entre Micheline (DD), Nicolas le professeur (F Ledoux) et son neveu (Louis Jordan). En définitive, il déçoit par sa logique ou quelque part sa morale. Sans vouloir spoiler, il est clair que le couple qui se formera sera - forcément ou évidemment - Micheline et le neveu. Quelque part, le spectateur est un peu déçu pour Fernand Ledoux qui est la bonté incarnée, même si la raison le disqualifiait d'avance.
Reste de pétillantes scènes où le professeur, Nicolas, fait visiter le collège à sa protégée déguisée en garçon ou encore lorsque Danielle Darrieux en nuisette saute sur le lit et rebondit en tombant par terre... ou encore ... ou encore ...
Reste des sublimes scènes comme celle où Danielle Darrieux a préparé le repas pour un Fernand Ledoux émerveillé ou à l'inverse, celle où Fernand Ledoux amène le petit déjeuner au lit à une Danielle Darrieux à qui ce n'était jamais arrivé ...
Reste des troublantes scènes où la même Danielle Darrieux, toujours en nuisette, découvre et observe, discrètement, les jeunes hommes en train de faire du sport ...
Parmi les autres acteurs de la distribution, notons un Jean Tissier dans le rôle d'un professeur de maths, un brin coquin, un brin pique-assiette, mais capable d'un grand cœur.
Une Gabrielle Dorziat en directrice de l'orphelinat qui, sous un aspect revêche et intransigeant, peut parfois développer un peu d'empathie.
Puis parmi, les collégiens, un Daniel Gélin qui arbore une banane, un Georges Marchal ou encore un Jean Parédès dont c'était les premiers rôles ou peu s'en fallait.
J'aime bien ce film très rafraichissant dans lequel Danielle Darrieux sait nous émouvoir, nous séduire (avec sa belle voix) et nous faire rire. Même si j'ai préféré, un chouïa en plus, "battement de cœur".