Titre bizarre, affiche intrigante et bande-annonce what-the-fuckesque : autant dire qu’il avait quand même des arguments pour m’attirer dans les salles ce « Psiconautas »… Et ce que j’en retire au final c’est que c’était un film… bizarre. Alors après, moi j’aime bien le bizarre, à condition malgré tout que ce ne soit pas du bizarre que pour du bizarre. Or il est vrai que le début de ce film prenait malheureusement cette voie que je n’apprécie pas trop. Certes, les visuels et l’univers étaient très créatifs, mais je ne voyais aucune dynamique se mettre en place, et ça, pour moi, ça sentait très mauvais. Limiter un film qu’à un enchaînement de tableaux et ne pas utiliser cette donnée qu’est le temps – ou plus précisément l’écoulement du temps – pour générer un univers et/ou une histoire dynamiques, pour moi c’est une erreur que (je l’avoue) je ne pardonne pas à un film. Fort heureusement, même si l’intrigue est pas mal fragmentée au départ, elle finit malgré tout par se lancer et, sur la deuxième moitié, je trouve qu’elle fonctionne très bien. L’exploration est réelle ; j’ai senti qu’on me racontait une histoire et que cette histoire me permettait d’explorer un univers qui avait sa cohérence. Et franchement ce n’était pas du luxe, parce qu’au fond cet univers est ultra anxiogène et pas mal des éléments qui le composent m’ont parfois glacé le sang de malaise. C’est fou d’ailleurs comment ce film parvient à générer des moments improbables mais face auxquels je me sentais assaillis par des émotions contradictoires.
(C’est tout bête, mais par exemple, il y a dans ce film deux personnages ultra-secondaires qui me faisaient vaciller entre l’étonnement drolatique et le rejet de mauvais goût, c’était le fils/chien et le réveil/robot. Ces deux personnages ne m’intéressaient guère, et pourtant quand le chien décide de noyer le réveil, je me suis senti émerger par une étrange tristesse. Un truc assez lourd et bien maussade.)
A dire vrai, l’une des essences qui anime chacune des scènes est cet étrange cohabitation entre une réelle cruauté d’une part et un instant de tendresse ou de lucidité paisible d’autre part. parfois, les deux cohabitent chez le même personnage, d’un instant à l’autre, d’une situation à l’autre… Ce mélange entre dureté sans scrupule de l’univers et ces moments où soudain quelque-chose de fragile et d’à fleur de peau survient, j’ai trouvé ça vraiment subtile et – oui j’ose le dire – assez rare au cinéma. Dommage d’ailleurs que le film peine à ce point à gérer le souffle de sa dynamique car je trouve que c’est vraiment là que le bas finit par blesser. Parce qu’en plus d’un début à la peine, c’est aussi sur son final que le film, selon moi, se troue. Ce final, il tombe comme un cheveu sur la soupe. Alors qu’une dynamique était pleinement lancée, elle est interrompue brutalement par une conclusion expéditive et un générique de fin qui débarquent là sans crier gare. Et là, franchement, non ce n’est pas possible. Pas comme ça. Franchement, j’ai eu l’impression que le film avait été pensé pour durer vingt minutes de plus mais que pour des raisons de restrictions budgétaires il fallait en finir au plus vite. Dommage parce qu’en termes de sens, cette fin n’était pas si absurde que cela.
(Se dire que fuir n’est pas la solution, mais que la porte de sortie se trouve dans une sorte de quête – illusoire peut-être – de revitalisation et de réhumanisation de l’endroit qui nous opprime, franchement moi ça me parle.)
Mais bon, pour que ça marche, il aurait fallu que cette scène finale survienne au bout de la dynamique lancée et pas pendant.
Là on était en train de découvrir toutes les facettes de Birdboy et de comment ce personnage essayait de s’y prendre pour dépasser sa condition. De la même manière, pour Dinki et ses trois amis, l’intrigue appelait à une révélation de l’autre côté de la traversée. Là – pif – une tempête refoule les prétentions de Dinki à jamais alors que juste avant elle avait échappé à mille fois pire. De la même manière – pouf ! – Birdboy se prend une balle qui le tue, alors que les précédentes ne l’avaient pas tué. Au regard de la progression de l’histoire, ça fait un peu fin en eau-de-boudin et c’est vraiment dommage.
Mais bon… L’un dans l’autre, je ne veux pas vous la faire à l’envers non plus : même si je ne mets « que » 3 étoiles à ce film (et cela pour les raisons que je viens d’évoquer) il n’empêche qu’il possède selon moi une vraie patte, très singulière et très pertinente je trouve, qui mérite qu’on se penche dessus pour peu qu’on aime le cinéma. Donc voilà, ne vous attendez pas forcément à un chef d’œuvre, mais au moins « Psiconautas » a le mérite d’être un film marquant, très marquant, et cela à bien des égards. Or, ça, ça se fait trop rare de nos jours pour être boudé… A bon entendeur j’espère…