Premier volet d'une trilogie qui ne sortira que dix ans plus tard en France, « Pusher » est souvent considéré comme le moins bon des trois épisodes. Pourtant, malgré un scénario plutôt classique, celui-ci frappe déjà fort en matière d'intensité et d'enjeux réels, d'autant que Nicolas Winding Refn opte pour des choix de mise scène particulièrement radicaux. Exploitant remarquablement un budget restreint, celui-ci montre beaucoup d'audace et parvient rapidement à accrocher notre attention sur ce truand minable, qu'un style quasiment amateur blindé d'images saturées vient suivre dans ces moindres mouvements. Ce choix permet ainsi de rendre presque attachant un personnage pourtant fort antipathique, car tellement seul et poursuivi par une poisse indescriptible qu'on ne peut que compatir parfois, d'autant que sa quête désespérée d'argent pour payer une dette offre souvent une belle densité à cette tragédie moderne, s'appuyant sur beaucoup de références tout en gardant systématiquement une identité propre. Bref, malgré quelques baisses de rythme, « Pusher » fait forte impression dans un Copenhague quasiment filmé comme une inquiétante ville fantôme : une réussite.