Ce film c'est d'abord la rencontre entre un réalisateur à la filmographie titanesque, Allan Dwan, et un producteur indépendant ayant fait fortune dans l'immobilier à Chicago, Benedict Bogeaus. C'est une collaboration qui va s'étendre sur dix films.
C'est aussi la première fois entre le réalisateur et l'acteur John Payne, qu'il retrouvera par trois fois. Dans ma tier-list imaginaire des acteurs hollywoodien de l'époque il est à mettre au côté d'un Randolph Scott. A ses côtés, on y croisent des noms plus ou moins connu comme Harry Carrey Jr, Dan Duryea ("La femme au portrait"), Lizabeth Scott ("L'Emprise du crime") ou Dolores Moran, femme à la ville de Bogeaus. Aucun des acteurs ne crèvent l'écran mais ils font le taf malgré quelques fausses notes d'interprétations.
Faut dire que "Quatre étranges cavalier" est un film à petit budget en co-production avec la RKO. Lors de l'entretien avec Peter Bogdanovich, le réalisateur cite un budget compris entre 600 et 800 milles dollars. C'est peu et ça se ressent parfois à l'écran dans la mise en scène. Il faut aller vite, pas le temps de retourner une scène qu'il faut passer à la suivante. C'est pour cette raison que la RKO avait engagé un réalisateur chevronné. Mais quand on a pas de pétrole, il faut avoir des idées. Et pour le coup, le film regorge d’ingéniosité, de la scène d'ouverture jusqu'au long travelling latéral de la poursuite dans la ville, Allan Dwan sait mettre à profit son talent malgré les manques financier. Il est toujours intéressant de voir comment certaines contraintes (techniques ou financières) peuvent être le terreaux des meilleurs idées. Encore faut-il avoir du talent, ce qui est le cas ici.
Mais ce n'est pas qu'un simple western de série B comme il y a tant à l'époque. C'est un western politique qui ose affronter le Maccarthysme directement. Déjà parce que le grand méchant porte le même blaze que le vieux Joseph, ce qui laisse peu de doute sur le discours que porte le film. D'autres symboles s'ajoutent à la liste.
Cette oeuvre est une vive critique contre l'opinion publique capable de faire de son voisin le pire des salauds en quelques secondes et de le détruire socialement sans preuve. La foule devient le tribunal populaire et le juge ou le prêtre auront beau faire, l'hystérie à pris la place de la raison. Il suffit d'aller une fois sur les réseaux sociaux pour se rendre compte que rien n'a changé, le tweet c'est la potence d'aujourd'hui.
Lorsque Peter Bogdanovich dans son entretien demande à Allan Dwan ce qu'il pense de son film. Il répond qu'il voulait surtout voir si il était capable de faire un film avec si peu de budget.De plus, il était content que les investisseurs rentrent dans leurs frais. Pour lui ce n'est qu'un western sympathique, le message politique n'est même pas abordé. Cet entretien me fait me demander si Dwan n'est qu'un artisan de talent ou un véritable auteur?