Ce "premier sang" versé introduira le second personnage iconique de la carrière de Sylvester Stallone, John Rambo. Vétéran de la guerre du Vietnam de retour au pays, paumé entre le rejet de l'opinion publique envers les boys partis vivre l'enfer pour la patrie et la difficulté d'une réinsertion civile pour ceux qui n'ont appris qu'à tuer.

A l'instar de son personnage de boxeur, Rocky Balboa, beautiful loser maladroitement charmant (demandez à Adrian !), Sly acceptera de trahir celui de Rambo pour les transformer en machines de propagande anticommunistes aux plus belles heures reaganiennes dans des suites musclées sur le fond assez douteuses. Il accédera ainsi au rang "d'action-movie-star" des 80's avant de connaître une relative traversée du désert causée par un virage mal négocié vers la comédie. Ses deux personnages phares continueront pourtant de l'accompagner durant cette période plus difficile. Chacun à leur façon, ils reviendront via la carte du retour aux sources, vers plus de simplicité et de modestie que la représentation de l'impérialisme américain (Le Commandant Sylvestre des Guignols de L'Info). Sans discuter ici de leurs qualités cinématographiques où de leurs succès au box-office, ces derniers films tentèrent au-moins, de rendre leurs lettres de noblesse à des personnages devenus cultes pour toute une génération.

Sly redorera son blason avec patience et l'aide d'une fan-base fidèle, qui rendra culte à force de temps passé certains actionners (Démolition Man, Judge Dredd).Il parviendra même à reconquérir le grand public avec la franchise Expendables. Il offrira aussi une nouvelle vie à son boxeur fétiche par sa reconversion en entraîneur du rejeton Creed dans des propositions convaincantes. Films et interprétations.

Le dernier d'un groupe d'élite

Malheureusement pour ce film inaugural, c'est bien cette image de machine de guerre body-buildée capable de gagner des conflits perdus à elle toute seule, qui colle à la peau de Rambo.

Alors qu'ici, outre la sueur et le sang, il n'y a guère que les morceaux éparpillés d'un compagnon d'armes mourant qui le font (dialogue - presque monologue - monumental doté d'une interprétation magistrale d'un Sly totalement investi).

Rambo, aux origines, n'est pas un héros des USA. Un soldat américain, oui, décoré, oui. Mais certainement pas un héros aux yeux d'une population qui le voit, au choix, comme un boucher, un drogué ou pire encore, comme le reflet de la défaite subie. Bien loin de l'esprit de corps. Le personnage est alors à l'inverse de ce qu'il deviendra par la suite. Trahison, disais-je, malgré mon attachement sincère à un personnage vedette de mon enfance (même dans les suites discutables).

Tellement teasé par mon grand frère, qui avait eu la chance d'accompagner notre daron sur le simple et trop injuste fait qu'il était suffisamment vieux pour le voir en salle, je pensais déjà le connaître par cœur ce film de guérilla urbaine, transposition du Nam en terrain montagneux américain.

Sans intention mauvaise aucune (comme ce sera le cas pour Terminator), simplement porté par la sincérité de son enthousiasme (qui je pense fût suffisant pour transformer Rambo en son Film Préféré), mon frangin me fît le menu par le détail des plats servis. Le couteau de chasse - et ses multiples options, les rapides flash-backs sur la captivité aux mains de l'ennemi - et les tortures inévitables, ipso facto les cicatrices, le Shériff Teasle, Galt, son sympathique adjoint adepte du lavage derrière les oreilles et prompt à la matraque, la poursuite à moto, saut de falaise, hélicoptère, une chasse nocturne dans les bois où celui qui fait la loi ne porte pas d'étoiles, l'armée, le Colonel, Rambo acculé et laissé pour mort mais en fait non bien sûr, et une fauche de M60 plus tard, c'est ce bled de l’Amérique profonde qui subit la colère de l'ancien béret vert. Cible principale, le Shériff évidemment. Mon aîné ira même jusqu'à me décrire le dernier regard menotté de notre antihéros sur sa victime policière avant le départ à l’hôpital pour l'un et la prison pour l'autre. J'ai dit teasing ? Du spoil complet avant l'heure serait plus adéquate ici. Sa seule erreur fût de confondre la mine abandonnée avec une grotte. Non vraiment, après son trentième récit, je le connaissais déjà par cœur ce film.

Et bien quelle claque magistrale ! Je savais tout mais ne cessait d'aller de surprise en surprise. Tout les éléments racontés par mon frangin étaient bien là, plus ou moins dans le bon ordre de surcroît, mais c'était aussi tellement plus. Musique, décor naturel à couper le souffle, et des putains de répliques qui tuent (rare exception chez moi, je milite ici pour la VF incroyable). Plus ou moins à égalité avec Terminator, c'est le film que j'ai le plus visionné dans ma vie... Et je sais que c'est pas fini !

C'est pas des civils bienveillants

Evidemment First Blood est avant tout un film d'action, superbement mis en scène, mais celui-ci propose un arrière fond des plus sérieux et s'y tient. Par sa séquence d'ouverture, son générique vagabond et le premier échange avec le Sheriff (délicieux Brian Dennehy).

Rambo, aux mains d'un système pour lequel il s'est pourtant battu se sent persécuté par ce dernier comme il le fût par l'ennemi.

Son évasion du commissariat sera l'introduction à l'action et lancera le film pour de bon. En quelques scènes claires et viriles, Ted Kotcheff plante un décor, des personnages et des enjeux crédibles. La chasse à l'homme peut commencer. Mais qui sera le chasseur ?

Dieu n'a pas fait Rambo

C'est par le personnage du Colonel Trautman (Richard Crenna, tout en morgue génialement cynique) que l'on appréhende vraiment celui de Rambo.

D'abord lors d'un échange tendu avec le Sheriff Teasle, ping-pong verbal mythique.

Puis avec l'appel radio du "chef de compagnie à corbeau" où les traumas d'un type déboussolé fendillent l'armure du guerrier fabriqué par un pays où il ne sent pas à sa place, sans plus aucun cadre.

Enfin il permet à son "poulain" un lâcher prise total dans ce final bouleversant et la possibilité sinon d'une rédemption mais d'une porte de sortie. Un échappatoire, qui le mènera aux suites et succès international.

C'était pas ma guerre

L'un des premiers films à traiter le retour au pays des vétérans du Nam avec crédibilité sous couvert de l'efficacité d'un film d'action haletant.

Plus qu'un chef-d'œuvre. Cultissime !!!

Goloumledosfin
10

Créée

le 19 déc. 2022

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Goloumledosfin

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