C'est le slogan publicitaire qui accompagnait les affiches du film à son lancement en1940 ...
Mais comment dissocier le roman du film, surtout la version de Hitchcock. Pour info, le roman de Daphné du Maurier fait partie des cinq meilleurs romans que j'aie jamais lus et ce depuis le temps de mes études (cf Top5 des livres) ... J'ai commencé par voir Rebecca dans un ciné-club à l'époque et ai découvert ultérieurement le roman qui m'a d'autant plus passionné que je reconnaissais, point par point les personnages que j'avais vus. Aujourd'hui, je ne sais plus dissocier ce film du roman. A jamais Joan Fontaine est la nouvelle épouse de Maxime, Laurence Olivier est Maxime et Judith Anderson est Mme Danvers.
Les deux, livre et film, commencent par cette phrase pleine de mystère dite par une voix calme, reposante aux accents modestes (dans la VO et dans la VF scrupuleusement respectée) :
"Last night I dreamt I went to Manderley again..."
La caméra de Hitchcock est sensationnelle car illustre parfaitement la description du livre avec la lune qui se reflète dans le château.
Même les différences - assez mineures - entre livre et film sont utiles car donnent de l'épaisseur aux différents héros en prolongeant une scène ou une réplique.
Une fois la présentation de Manderley faite, le spectateur est plongé dans l'univers factice de Monte Carlo qui est une aimable parenthèse avant d'attaquer le dur. L'arrivée à Manderley et la rencontre de la nouvelle Mme de Winter avec Mme Danvers. L'angoisse du spectateur ne fait que démarrer afin de croître pratiquement jusqu'à la fin du film.
Lors du premier visionnage du film, la phrase initiale ne permet en aucun cas de rassurer le spectateur : au contraire.
Lors des visionnages suivants, le spectateur se complait alors à examiner comment et pourquoi le malentendu s'aggrave de scène en scène.
Les trois acteurs et actrices Laurence Olivier, Joan Fontaine et Judith Anderson jouent avec beaucoup de naturel sans aucun surjeu, sans aucun cabotinage. Mais quelle efficacité !
Une mention particulière pour Joan Fontaine qui joue à la perfection la frêle personne du roman, effrayée par cette nouvelle vie mais qui tente de redresser la tête malgré les "coups" assenés avec un sadisme consommé par Judith Anderson. Son regard qui chavire de bonheur ou de frayeur est inoubliable. Comme la scène charmante où elle explique à Maxime qu'il faudrait pouvoir mettre un instant de bonheur en flacon pour pouvoir ultérieurement, de temps en temps, le respirer.
Justement, Judith Anderson, avec son air de sainte nitouche, impénétrable et silencieux, avec son amour malsain de Rebecca, impressionne autant le spectateur que Joan Fontaine. Sa silhouette noire est devenue tellement emblématique qu'elle sera copiée dans le dessin animé "Cendrillon" pour le personnage de la marâtre...
Le personnage joué par Laurence Olivier bascule tour à tour de l'anxiété à la colère puis à la tendresse de façon très convaincante.
Même les personnages secondaires sont bien travaillés comme le régisseur Crawley qui est un personnage bien gentil dans le roman.
Et qui peut aussi oublier le dernier mot de Mrs Van Hopper à Monte Carlo avec son terriblement cinglant et humiliant "Mrs de Winter".
Hitchcock signe ici un grand film romantique avec un suspense haletant et avec de beaux personnages magistralement interprétés dans le respect scrupuleux du roman de Daphné du Maurier.