"Grabarlo todo Pablo. Por tu puta madre."
Je pense que cette note est un peu surévaluée. Je ne suis pas sûr que je qualifierais vraiment REC de très bon film. Oh, il est plein de qualités et d'originalité, mais il a quelques défauts qui font que peut-être, ne vaut-il pas un 8. Et pourtant, quelque chose, dans ce film, a su appuyer sur les bons boutons dans la case cinéphile de mon cerveau, et me le faire apprécier presque comme si c'était le cas. Oh, et puis merde : après tout, quelle est la différence entre un très bon film et un film que j'apprécierais comme tel ? Alors, quel est-il, ce quelque chose ?
Déjà, c'est un fait : j'aime beaucoup les films à concept ; de Memento à Source Code, en passant par Un jour sans fin, un exercice de style bien réalisé suffit à me faire trouver un film fun (loin de moi l'idée de suggérer que les films ci-dessus soient réduits à un exercice de style). Et l'exercice de style mis en œuvre dans REC - la caméra à l'épaule - est particulièrement imposant, puisqu'il remplit presque tous les rôles : il sert de pitch, construit toute l'histoire ET la narration - en imposant notamment une unité de lieu, d'action et de temps -, et bien sûr, toute la mise en scène s'articule autour de lui. Et mise en scène il y a.
Alors, je sais qu'il y a un vaste débat sur la question "le style documentaire/found footage est-il une solution de facilité ?". Je trouve la question pertinente ; l'idée de départ était géniale, déjà parce qu'elle justifiait la présence même de la caméra dans l'intrigue, éliminant presque toute sensation de fiction. Ce n'est plus le quatrième mur qui est brisé, c'est la maison toute entière. Après, on peut carrément dériver sur le débat entre réalistes et anti-réalistes, mais c'est vraiment une autre histoire. Toujours est-il que, toute géniale que soit l'idée du found footage, en quelques années le genre s'est codifié, standardisé, puis, forcément, essoufflé. Il devenait lassant de voir à quel point la dynamique apportée par la caméra était forcée, un exemple parfait étant les personnages rappelant constamment sa présence, et le film commençant immanquablement par un personnage demandant "Pourquoi tu filmes ?".
Et c'est là que j'en reviens à REC : non seulement le film se joue gentiment de beaucoup de ces clichés (la plupart étant (plus ou moins) subtilement tournés en dérision durant la scène d'intro), mais il crée en plus un véritable lien, naturel, organique, entre l'histoire et la narration. L'erreur principale du found footage était précisément de tout miser sur la narration, au détriment de l'histoire. Alors, oui, REC n'a presque pas d'histoire, cela fait partie des critiques qui pourront compréhensiblement être portées contre le film. Mais pour moi, un film de zombies comme REC fonctionne comme une montagne russe : je n'attends pas d'histoire fouillée ni cérébrale, mais simplement une bonne dose d'adrénaline de la part des réalisateurs. Aussi, lorsque je parle de l'histoire et de la narration qui s'alimentent mutuellement, évidemment, ça se résume à voir comment une douzaine de personnes enfermées dans un bâtiment vont chercher à survivre à la contagion progressive d'un virus chelou. Mais dans ce contexte bien délimité, tout s'enchaîne avec talent, et les trouvailles de mise en scène s'y prêtent impeccablement.
Et indépendamment de la question sur la facilité du genre, je pense qu'objectivement, la dynamique apportée par la caméra subjective est originale et constamment mise à profit de façon efficace et fun, ce qui fait que j'ai eu plutôt peur devant ce film (mais bon, je ne suis pas exactement une référence de stoïcisme face aux films d'horreur). Le rythme est à peu près irréprochable, à ceci près que beaucoup trouveront la scène d'intro, où il ne se passe presque rien, trop longue (10-15 minutes environ), mais je ne me suis pas ennuyé pour ce qui me concerne. Par la suite, une fois l'immeuble atteint, les événements s'enchaînent et la montée en puissance du rythme est implacable.
Voilà donc ce qu'est REC à mes yeux : une montagne russe décorée comme un train fantôme, à la progression linéaire mais haletante, et pleine de petits traits d'originalité adrénalinogènes. Et je pense que vu comme ça, le film est largement appréciable, ce qui est une bonne nouvelle, puisque j'ai réussi à identifier le quelque chose dont je parlais en début de critique. Ah, et je devrais mentionner, à ce même sujet, que j'ai un petit faible pour Manuela Velasco (incarnant la présentatrice, Angela), ce qui aide également.