Dès la première séquence de ce film noir (un suicide presque subjectif), le ton est donné. L'ensemble sera sombre et pessimiste. Et pour cause, on suivra un policier qui tente d'enquêter dans une ville où tout le monde lui met des bâtons dans les roues : supérieur direct craintif, grand chef corrompu, et gangsters tout puissants ! Mais quand les choses deviendront personnelles, notre héros comprendra qu'il doit lui aussi user de sales méthodes...
"The Big Heat" (à ne pas confondre avec "The Big Sleep", autre classique du film noir) s'avère assez moderne. D'abord sur le traitement des femmes. Souvent réduites dans ce genre à des victimes ou des séductrices malfaisantes, leur rôle est ici plus complexe. Elles en viennent même à prendre les choses en main ! Ensuite sur notre héros. A la suite d'un drame osé, il deviendra narquois, presque cynique, et n'hésitera pas à franchir la ligne rouge pour arrêter les coupables.
On peut s'étonner que la relation avec sa fille soit purement fonctionnelle pour les besoins du scénario. Ainsi, il ne discutera jamais avec elle du décès de son épouse, causé par le fait qu'il a joué les gros durs devant la pègre. Mais la modernité a ses limites pour un film de 1953 !
Dans ce rôle, Glenn Ford est très sobre, intériorisant sa douleur et surtout sa colère. Une prestation qui étonnera peut-être ceux qui sont habitués aux méthodes plus expansives (et plus tardives) de l'Actors Studio. Mais elle est convaincante pour l'époque. Face à lui, on appréciera Lee Marvin, excellent en crapule sadique, ou Gloria Grahame en femme qui prend conscience de la pourriture de son milieu.
Côté mise en scène, Fritz Lang exploite son passé expressionniste, nous livrant quelques jolis jeux d'ombres, qui renforcent les tourments des personnages. Ils permettent de hisser l'ensemble dans le haut du panier des films noirs.