Je vais pas tourner autour du pot, j'ai vraiment pas été enthousiasmé par Règlement de comptes. Une fois le visionnage arrivé à son terme, j'ai cherché à comprendre pourquoi Wild Side avait cru bon de dédier à ce polar bien banal une édition Blu-Ray aussi "luxueuse". Ca tombe bien, puisque l'éditeur a regroupé une analyse de Jean Douchet sur 200 pages et des interviews de Scorsese et Michael Mann en bonus. Eh bien après lecture et écoute, j'ai surtout l'impression que ces témoignages font office de cache-misère. Douchet brasse du vent comme il sait si bien le faire, à coups de théories incroyablement fumeuses, de digressions complètement inutiles et de lapalissades bien pratiques quand on a 200 pages à remplir mais pas grand chose à raconter.
Scorsese ne me convainc pas plus. Il voit dans le film la transformation d'un homme ordinaire en bête sanguinaire assoiffée de vengeance. Possible, mais alors il faut mettre de côté l'interprétation molle et peu convaincante de Glenn Ford, et ça désolé mais je peux pas. En revanche j'acquiesce quand il parle de "platitude", même si pour lui c'est un compliment : une mise en scène transparente renforcerait l'objectivité du spectateur. Possible, mais alors quand on rajoute une mise en scène plate à un scénario plat, c'est un peu mettre les pieds dans le plat, ne trouves-tu pas mon petit Marty ?
Parce que oui, il y a quand même quelques gros soucis avec ce scénario. On en revient toujours à ce bon vieux Glenn Ford, ou plutôt à ce sergent Bannion qui a une logique assez bizarre. Si j'étais méchant je dirais même que c'est un sacré amateur doublé d'un irresponsable, à tel point que je pense avoir rarement vu un flic aussi mauvais et irrationnel au cinéma depuis Martin Lawrence dans Flic de haut vol (oui je viens de citer Martin Lawrence dans une critique sur un film de Fritz Lang) (et oui j'ai vu Flic de haut vol, mais y'a prescription).
Mettez-vous à sa place une minute : vous êtes flic, marié, vous êtes le père d'une petite fille, vous recevez des menaces par téléphone, quelle est votre réaction ? Demander une protection policière pour votre famille ? Aller passer quelques jours dans un endroit plus calme ? Réclamer une mutation ? Rien de tout ça, vous vous appelez Bannion et vous allez tout droit chez le chef de la mafia locale (parce qu'avec tous les criminels qu'il y a dans la ville, si quelqu'un vous a menacé ça vient sûrement de lui, quelle logique à toute épreuve, je suis coi), vous le mettez en rogne et vous assommez son gorille. Un magnifique exemple de comportement sensé et raisonnable à même de mettre votre famille à l'abri.
Notre brave Bannion va poursuivre son enquête sans jamais dénicher la moindre preuve, accusant les uns et les autres sur la base de ses propres intuitions. Heureusement pour lui il faut dire que les méchants sont bien méchants et qu'ils ont la gentillesse de faire des trucs de méchants pour bien lui montrer qu'ils sont méchants.
S'il y a un bon point à retenir du film, c'est celui soulevé par Michael Mann, à savoir le rôle des femmes dans l'intrigue et la façon dont elles sont représentées, sur un pied d'égalité avec les hommes, de la femme de Bannion à Mme Duncan qui fait chanter la mafia. En passant évidemment par Debby (Gloria Grahame), le personnage le plus fascinant et sans conteste le plus réussi.