Qui se souvient d'un joli film argentin de Daniel Burman intitulé Toutes les hôtesses de l'air vont au paradis ? Il y avait en tous cas un peu plus d'élégance dans ce titre que dans Rien à foutre; premier long-métrage de Julie Lecoustre et d' Emmanuel Marre qui trace le portrait d'une fille de l'air, Cassandre, employée d'une compagnie low-cost. Le naturel et la spontanéité des scènes et des dialogues, qui paraissent parfois improvisés, donnent parfois l'impression d'un reportage ou d'un documentaire, d'autant qu'aucune intrigue réelle ne vient s'ajouter au récit du quotidien de cette hôtesse de l'air dépourvue d'ambition apparente, ballotée sans véritable réaction et dont la vie personnelle, entre deux vols, se résume à des ivresses de fête et à des rencontres Tinder. Sans transition entre les séquences, le film ne manque pas d'intérêt, bien que la mise en scène très proche de son héroïne, ne suscite que des émotions plutôt neutres. Cela dit, le caractère social de Rien à foutre est pertinent dans une description minutieuse des contraintes de ces prolétaires de l'air dûment exploitées. La deuxième partie du long-métrage, plus terre à terre, est censée reconnecter Cassandre à ses racines et à son environnement mais s'avère en définitive plus fastidieuse que palpitante. Le film est comme l'albatros de Baudelaire qui a du mal à se mouvoir sur le plancher des vaches mais il possède heureusement un atout de choix dans sa manche : Adèle Exarchopoulos. Celle qu'on a souvent raillé pour ses scènes dénudées et ses moues boudeuses a pris son envol en 2021 avec des rôles très différents dans Mandibules, BAC Nord et Rien à foutre où elle est presque constamment à l'image et remarquable de bout en bout.