Ah j’ai toujours l’impression d’être un brin sévère avec Sebastian Schipper… Parce que l’air de rien c’est un mec qui tente des choses ; qui livre une vraie sensibilité.
Prenez par exemple ce « Roads ». Dès le départ je lui ai trouvé un caractère brut et enlevé. Un film nerveux et à fleur de peau. Quelque-chose qui est à la fois permis par un cadre très agressif, mobile, caméra au poing, souvent en mouvement dans l’espace, mais aussi par une intrigue qui chemine autour d’un axe simple et qui oblige tous les protagonistes à être en permanence dans l’action et souvent dans la précipitation.
Ce dispositif est d’autant plus efficace que Sebastian Schipper sait entrecouper ces moments de nervosité par des instants de repos et de suspension. Il y a une respiration dans la réalisation de ce gars qui favorise l’expression d’histoires fortes menées par des personnages à vif.
Seulement voilà, un peu comme dans « Victoria », l’histoire et les personnages, c’est un petit peu les bas qui blessent dans ce « Roads ». Certes, ces deux gars là ont quelque-chose de touchant dans ce qu’ils sont, dans ce qu’ils font et dans ce qu’ils ressentent, mais le film ne parvient pas à leur donner suffisamment de relief sur l’ensemble de l’intrigue. Au bout d’un moment on a fait le tour, la relation stagne et l’ensemble s’embourbe.
Alors après je ne dis pas : je pense qu’il y avait une volonté manifeste à nous faire ressentir cela, surtout pour le personnage de Gyllen. Malheureusement, je trouve que nous aussi, spectateurs, on s’embourbe un peu avec eux. Moi, face au générique de fin, je me suis dit : « mais finalement tout ça pour quoi ? » Qu’est-ce que m’a vraiment apporté / révélé le fait de suivre cette aventure à travers l’Europe ? Moi en tout cas je n’en ai vraiment pas tiré grand-chose. Et d’une certaine manière, je trouve que le parcours de Gyllen est finalement assez révélateur de ce qu’est ce film et de ce qu’est, en filigrane, la démarche de Sebastian Schipper. Beaucoup d’énergie, beaucoup d’envie, beaucoup de vie, mais qui s’élance sans vraiment savoir où aller, et qui finit par arriver nulle part, essoufflé…
Et franchement, ça m’attriste un peu parce que tout n’est pas à jeter dans « Roads ». Je trouve qu’il est capable de quelques fulgurances ; de saisir des instants. Et c’est en cela que je dis que je me trouve un peu cruel avec ce film. Parce que oui, pour beaucoup il pourra valoir le détour et cela pour les qualités que j’ai précédemment citées.
Mais bon, pour ceux qui me connaissent, c’est toujours mon ressenti qui tranche et, sur ce point, je ne vais pas vous mentir, je ne pense pas que « Roads » restera gravé dans ma mémoire et dans mon cœur…