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En 1944, Rome est déclarée ville ouverte et est occupée par les autorités SS. En s'inspirant de figures historiques existantes, Rossellini filme ces 9 mois d'occupation peu de temps seulement après la fin de la guerre.

De par son réalisme quasi-documentaire, le chef d'oeuvre de Rossellini est considéré par beaucoup comme le tout premier film du néoréalisme italien. A juste titre, puisqu'il en possède toutes les caractéristiques: un réalisme vertigineux, presque épuré de tout effet dramatique (je dis bien presque), un budget extrêmement maigre qui finalement participe à l'impression de réalisme et de modestie puisqu'il implique des prises de vue en décors réels, une pellicule d'une qualité moyenne, des acteurs non-professionnels pour beaucoup ou débutants... Et surtout, cette approche noire et pessimiste d'une réalité révoltante et ce fatalisme latent qui agissent bien souvent comme motifs dans le néoréalisme italien. Pas étonnant donc que le film qui date officiellement la naissance du courant soit un film sur la guerre.

Car de cette approche modeste mais honnête résulte forcément un fort sentiment d'authenticité. C'est comme si Rossellini nous disait "voici l'occupation telle que si vous la viviez". Le film nous attrape à la gorge mais nous ménage dans sa première partie, en nous présentant des personnages admirables, convecteurs d'espoirs et d'idéaux: dans cette première partie, on nous montre des personnages qui luttent et le danger de l'ennemi n'est que théorique, les allemands ne sont pas d'ailleurs montrés dans toute leur cruauté et ça peut même être le contraire.

Puis tout bascule à la moitié du film, le film nous agrippe pour ne plus nous lâcher et c'est le ventre noué qu'il nous faudra surmonter la noirceur de la seconde moitié où l'humanité est mise à mal. Paradoxe éternel du cinéma, les scènes les plus cruelles sont souvent les plus belles, et l'on est fasciné par l'image tout en ressentant un violent malaise. Le discours de Rossellini est terriblement pessimiste: si pour la plupart des héros, notre admiration demeure, toujours est-il qu'aucun n'est épargné, et on se sent à la place du prêtre (dont aimerai croire pouvoir s'identifier mais à moins d'avoir vécu la guerre il n'en est rien): contraint d'être témoin des atrocités subies par ses pairs et n'avoir que la force de prier pour eux.

L'horreur de la guerre rejoint donc une fois de plus la beauté du cinéma dans un film terriblement réaliste dont on ne peut ressortir intact. Un témoignage brut d'une humanité encore mutilée par 5 ans de guerre qui précède la naissance d'un des plus grands mouvements de l'histoire du cinéma qui nous donne à goûter l'aigreur d'une réalité dont on ne peut détourner les yeux (d'un point de vue purement pratique, ça serait passer à côté de chef d'oeuvre magnifique).
LeJezza

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