Passons sur le titre passe-partout du film (choisi à la va vite ?) pour apprécier le casting. Daniel Brühl (oui guyness, ce nom…) en interprète de Niki Lauda ? Acchhh, zedt agzent audrichien pour la vf… Sinon, prestation remarquable, notamment au niveau du visage. James Hunt est également ressemblant, même si le scénario en fait un beau gosse irrésistible auprès des femmes, alors qu’il avait le visage rougeaud. Mais l’attraction (la fascination) exercée par ces pilotes est due à leur façon de tutoyer la mort. A l’époque, deux pilotes de F 1 mouraient au volant chaque saison (imparfait parce que ce n’est plus vrai, les conditions de sécurité ont évolué). Pourquoi le dire, alors que l’accident (Watkins-Glen 6-10-73) qui a coûté la vie au prometteur François Cevert est évoqué, sans que son nom soit cité ? Le pilote français avait sorti un bouquin dont le titre est La mort dans mon contrat…
Ron Howard n’a donc pas la finesse d’un Lubitsch, mais il connaît son métier. Petite trouvaille, il montre deux bolides qui se suivent de près soudain cachés par des arbres. Quand on les voit à nouveau, l’ordre est inversé, laissant imaginer la manœuvre au spectateur. Ce côté mystérieux fait partie du charme de la course automobile d’avant les caméras multiples auxquelles rien n’échappe, permettant parfois au spectateur de mieux suivre les péripéties que les commentateurs…
Toute la partie sportive colle à la réalité. Exemple avec la Tyrrell à 6 roues des saisons 1976 et 1977. Le choix de la saison 1976 de F 1 garantit un incroyable suspense, puisque l’issue du championnat restait incertaine après le drapeau à damier de l’ultime grand prix, terminé dans la confusion la plus totale. Très beau travail du côté de la technique (les F 1) et des décors (publicités sur les F 1 et les combinaisons des pilotes). Les bolides sont impeccables et filmés de telle façon qu’on n’a pas la sensation d’assister à un spectacle rétro. Ca bouge, ça va vite, parfois même trop puisque certaines scènes sont filmées comme des batailles, avec une multitude de détails qui se succèdent sans qu’on puisse rien distinguer, alors qu’il y avait moyen de présenter davantage d’images de courses.
Parmi les détails qui crédibilisent, les noms des différents circuits ainsi que ceux des pilotes et de leurs écuries. Le jeu de chaises musicales pour les places dans les écuries, l’influence de l’argent, certains pilotes étant engagés avec des contrats faramineux, d’autres payant pour conduire, tout cela c’est la vérité. Et même si le personnage du Commendatore Enzo Ferrari est peu présent, son caractère et sa stature sonnent juste. Parmi les pilotes, la figure du suisse Clay Regazzoni fait également plaisir à voir, avec sa belle moustache.
Un point très intéressant est le moment clé de la réunion des pilotes face aux commissaires de course avant le Grand Prix d’Allemagne au Nürbürgring (record du tour à l’époque, aux alentours de 7 minutes !), ce fatal 1er août 1976. Lauda sent que les conditions atmosphériques sont plus que limites. Il demande que la course soit purement et simplement annulée. Une proposition de bon sens que Hunt a beau jeu de retourner à son avantage. En effet si la course est annulée, personne ne marque de point et Lauda conserve son énorme avantage numérique. C’est ainsi que James Hunt convainc la majorité de courir et Lauda de prendre des risques suite à un concours de circonstances en course. On remarquera que la décision de courir l’ultime Grand Prix, au Japon, sera prise par les commissaires indépendamment des opinions des pilotes, alors que les conditions seront infiniment plus difficiles…
Niki Lauda (surnom « L’ordinateur » jamais cité, dommage…), le grand champion au mental infaillible n’est donc pas à l’abri des sautes d’humeur (le film insiste ensuite davantage sur la culpabilité de James Hunt que sur cette réelle faiblesse, dommage là aussi). Une petite faute et le voilà qui dérape, se fait percuter par d’autres concurrents. Le réservoir d’essence percé, le véhicule s’enflamme aussitôt… et on entre dans la légende avec le sauvetage miraculeux de l’autrichien par 4 pilotes intervenant dans des conditions effroyables. Entre la vie et la mort à l’hôpital, Lauda se voit administrer l’extrême onction. Puis, de son lit d’hôpital, peut-être gavé de… laudanum mais certainement pas de course automobile, Niki-les-bandelettes observe (télévision) son rival anglais engranger les points course après course. Nouveau miracle, par une incroyable volonté renforcée par la rivalité (moteur du film), Lauda brûlant d’impatience, revient 6 semaines après pour défendre ses chances au championnat du monde. La façon dont il reprend confiance lors de sa course de reprise tient plus d’un épisode de Michel Vaillant que de la réalité, mais c’est du cinéma, ça passe. Finalement, la façon de présenter l’histoire ne peut rien y changer, le héros c’est Niki Lauda.
Le film véhicule de nombreux clichés, notamment dans les relations des pilotes avec les femmes. Le parallèle entre les pistons qui réagissent aux accélérations et le comportement de ces hommes au lit avec leur belle du moment ne manque pas de faire sourire. Une séquence retient néanmoins l’attention. Dans une vieille Peugeot, Niki conduit Marlène, sa future femme, en pleine campagne italienne (il vient d’être engagé par l’écurie Ferrari) et il détecte tous les petits défauts de la voiture (grâce aux vibrations qu’il sent dans ses fesses). Comme par hasard, peu de temps après, la voiture est en panne, Lauda le metteur au point d’exception est impuissant. Et, pour inciter des automobilistes à s’arrêter pour donner un coup de main, mieux vaut être une jolie femme qu’un jeune homme timide au visage un peu fermé. Le scénario retourne la situation de fort jolie manière, au bénéfice du prestige de la marque Ferrari.