Il est temps que ça s'arrête
Ca commence par un "jeu" impliquant une nana qui a fait les yeux doux à deux mecs à la fois. Sauf que les deux mecs sont aussi dans le jeu, dans une cage de verre en plein centre ville aux yeux de la foule. Super vraisemblable.
Après cela, on se rebranche sur les intrigues précédentes: la femme de Jigsaw essaie de se débarrasser d'Hoffmann, le flic qui a repris la franchise du tueur au puzzle. Hoffmann s'en sort, au prix d'une joue déchirée (qu'il va recoudre très proprement, comme quoi ça sert, l'éducation donnée aux petites filles). Hoffmann, vilain rancunier, va traquer la femme en question.
Là-dessus se greffent diverses intrigues visant à répandre le plus de sang poisseux et de cervelle possible: un imposteur qui fait fortune en vendant le récit (inventé) de l'expérience de résilience qu'il aurait vécue en échappant à un "jeu" de Jigsaw. Mais, comme ce n'est pas vrai, Hoffmann lui fait subir un parcours gratiné dans les inénarrables friches industrielles, caves pourries et ateliers rouillés qui sont le décor habituel de la série.
Passage assez jubilatoire: un groupe de marginaux racistes se fait réduire en Ketchup par un moyen fort ingénieux.
Hoffmann s'attaque aussi à un ancien collègue flic, Gibson. Déception: il ne se débarrasse de ce flic qu'à coups de mitrailleuse. Vulgaire.
A part la séquence d'ouverture, inhabituellement lumineuse, le film est un jeu vidéo souterrain enchaînant les épreuves les plus glauques et les plus atroces, sans jamais d'espoir de s'en sortir pour l'acteur mis en scène.
On revoit Tobin Bell qui vient se faire dédicacer le livre par l'imposteur, mais rien de génial là-dedans.
Si John Kramer, et éventuellement son successeur Hoffmann, ont un petit côté de justicier implacable, en révélant et punissant les vices et lâchetés de tout un chacun, on a le sentiment croissant que même cette morale est de plus en plus relative, et que les scénaristes ne se foulent pas trop pour proportionner les souffrances des joueurs au niveau de la faute qu'ils ont commise. Si toutes les filles qui se font deux mecs en même temps devaient finir en carpaccio gluant, faudrait circuler en jet-ski dans nos villes.
En fait, Saw a perdu son frisson métaphysique et cérébral, lié à John Kramer, pour n'être plus qu'une enfilade de chairs passées au mixer ou à la perceuse. Reste l'ingéniosité des dispositifs mécaniques mis en place à chaque fois. Si je savais bricoler comme ça, je ferais bien participer mon chef à un "jeu", tiens !
Un dernier mot: le titre est "Saw 3D". C'est une honte. La 3D n'est absolument pas exploitée ici, en dépit de toutes les potentialités qu'elle pouvait offrir. Le même film en 2D serait identique, sauf une ou deux gouttes de sang qui gicle.