Attendez, ça va être trop drôle je vous dis.
C'est de ça que part ce film, cette façon vouée à l'échec d'annoncer avant l'heure qu'on va faire marrer tout le monde. Mais bon c'est la mission de notre samouraï et un samouraï ça a de l'honneur, donc ça fait ses missions.
Enfin de l'honneur, il ne lui reste plus des masses. Déjà il a plus d'épée, en plus il se fait tabasser par les méchants les plus loosers de tout le japon, et maintenant il doit faire le bouffon du prince. Et pour parachever tout ça, un sentencieux «le suicide» désabusé est la conclusion d'à peu près toutes ses actions... venant de sa fillette de 5 ans, ça met pas le moral. (Je ne sais pas où il ont trouvé cette petite puce d'ailleurs, mais elle est absolument géniale.)
Voilà donc le thème de ce film, l'humiliation répétée, la démonstration de la nullité, l'acharnement de tous contre un bon bougre. Et tout ça est soigneusement mis en scène par le protocole social, qui fait chacun à son tour deviendrait le bourreau du pauvre homme, dans une gêne insupportable. «Oh putain, ça sent le film bien dégoulinant de misérabilisme !». Sauf que non, absolument pas. Car Matsumoto choisi la voie du comique absurde (c'est de circonstance !) et visuel (ça nous évitera les dialogues !), un peu comme «La Fée» l'avait fait pour la dépression.
Et c'est là que le génie prend, on se marre du début à la fin. Tous les gags sont plus nazes les uns que les autres, et donc très drôles, et font preuve d'une ingéniosité et d'une sophistication dans l'art du bide qui frise le génie. Et plus ça va, et plus les engins se font complexes (canon, tremplins, tours etc.), dans cet auto-dérision et cette disproportion qui ne se prennent pas au sérieux typiquement japonaises, un peu comme dans certains mangas.
Tout ça est sublimement mis en scène, dans le tempo, dans le silence. Le visuel ça se mérite, ça se rate facilement, mais alors quand c'est réussi quel régal ! C'est assez gênant pour être drôle, mais jamais insupportable. Matsumoto mène vraiment cela de mains de maitre. Et du coup comme ses deux gardiens et sa petite fille, on se prend d'affection pour le nullos. Peut-être autant pour ses gags, parce qu'il occupe le temps, il devient un peu l'attraction du quartier, que pour ce sa personne. Mais au fond tout le monde se fiche de lui ... enfin presque tout le monde. Et donc sans vous raconter la fin, je la trouve encore une fois très touchante, mais subtile, qui n'en fait pas des caisses. On reste très proches des personnages, toujours un petit sourire à la bouche.
Et comme pour «La Fée», ce serait injuste de reléguer ce film au «non-sens» ou à la «légèreté». Non ! ce film a plein de chose à dire, il aborde des sujets lourds, mais le fait très bien. Et Matsumoto nous montre le versant japonais d'un art qui tend à disparaitre, tant il est ingrat, le comique visuel. Pourtant quand c'est réussi, c'est d'une puissance inégalée.