Jonás Trueba s'amuse.

Il superpose les images, remonte le temps, bouscule son montage, fait des splits screens, bouscule les raccords, imagine des cartons ironiques.

Il s'amuse.

Citant Truffaut, Hong Sang-Soo, Kierkegaard, son père (Fernando Trueba), lui-même.

Il s'amuse.

Il joue avec le rythme, les genres, les styles, passant sans prévenir du mélo arty à la comédie.

Il brise le 4ème mur, plonge son film dans son film, bouscule les linéarités, s'autocritique.

Il s'amuse, en famille, avec ses amis, son père, son frère, sa troupe, avec lui-même, mettant en scène son alter ego ("Prueba").


Mais derrière cet amusement, ce jeu de mot visuel de deux heures, cette grammaire complexe mais légère, Trueba touche, de manière peut-être plus frontale, la tristesse, creuse l'amour, ses méandres, ses circonvolutions, son ridicule, sa gravité. En tournant le dos au spectaculaire, aux thèmes avec un grand T, Trueba nous parle mieux que personne du quotidien, et par sa forme bousculée, de ses accidents et de leur sublimation.

Dans une œuvre à nulle autre pareille (linéaire ou circulaire, ou même en zig zag, on ne saura répondre) et poétique, volontairement maladroite, créant la confusion entre l'art et la réalité, nous surprenant sans cesse, il nous fait tourner la tête.

Et continue de tisser le fil d'une filmographie qui délivrera son génie et sa cohérence au moment où le collier qu'elle fabrique sera perlé.

Charles_Dubois
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films espagnols, Journal cinéphile 2024 et Les meilleurs films de 2024

Créée

le 13 juin 2024

Critique lue 396 fois

3 j'aime

Charles Dubois

Écrit par

Critique lue 396 fois

3

D'autres avis sur Septembre sans attendre

Septembre sans attendre
Plume231
7

Une séparation !

Jusqu'ici, le cinéma de Jonás Trueba suivait, pour ses longs-métrages, une même structure filmique en alignant les longues séquences dialoguées, souvent filmées en plan-séquence, le tout autour d'un...

le 29 août 2024

16 j'aime

5

Septembre sans attendre
Marcus31
3

Sur l'écran et dans la salle, l'ennui

Comme je suis un gars plutôt gentil et que je n'ai pas la prétention d'être un pro du cinéma, je préfère écrire que je n'ai pas du tout aimé plutôt que d'inscrire le terme navet dans cette chronique...

le 10 sept. 2024

7 j'aime

3

Septembre sans attendre
Cinephile-doux
7

Les joies de la séparation

Il peut être tout à fait légitime de s'agacer du succès (tout relatif) des films de Jonás Trueba qui, s'ils étaient français, seraient vraisemblablement qualifiés par le dévalorisant épithète de...

le 4 juil. 2024

6 j'aime

Du même critique

Les Blues Brothers
Charles_Dubois
5

Critique de Les Blues Brothers par Charles Dubois

Film emblématique d'une génération, The Blues Brothers n'a pas réussi à me convaincre. En tous cas pas totalement. Certes je n'ai pas passé un mauvais moment, j'ai même ri franchement à certains...

le 29 déc. 2015

18 j'aime