Jonás Trueba s'amuse.
Il superpose les images, remonte le temps, bouscule son montage, fait des splits screens, bouscule les raccords, imagine des cartons ironiques.
Il s'amuse.
Citant Truffaut, Hong Sang-Soo, Kierkegaard, son père (Fernando Trueba), lui-même.
Il s'amuse.
Il joue avec le rythme, les genres, les styles, passant sans prévenir du mélo arty à la comédie.
Il brise le 4ème mur, plonge son film dans son film, bouscule les linéarités, s'autocritique.
Il s'amuse, en famille, avec ses amis, son père, son frère, sa troupe, avec lui-même, mettant en scène son alter ego ("Prueba").
Mais derrière cet amusement, ce jeu de mot visuel de deux heures, cette grammaire complexe mais légère, Trueba touche, de manière peut-être plus frontale, la tristesse, creuse l'amour, ses méandres, ses circonvolutions, son ridicule, sa gravité. En tournant le dos au spectaculaire, aux thèmes avec un grand T, Trueba nous parle mieux que personne du quotidien, et par sa forme bousculée, de ses accidents et de leur sublimation.
Dans une œuvre à nulle autre pareille (linéaire ou circulaire, ou même en zig zag, on ne saura répondre) et poétique, volontairement maladroite, créant la confusion entre l'art et la réalité, nous surprenant sans cesse, il nous fait tourner la tête.
Et continue de tisser le fil d'une filmographie qui délivrera son génie et sa cohérence au moment où le collier qu'elle fabrique sera perlé.