Adaptation très libre d’une pièce de théâtre contemporaine Design for Living parvient à délivrer en tout juste une heure et demie un concentré du vieil Hollywood. Script millimétré, concept prenant et acteurs brillants qui, par leur jeu témoin de la transition vers le parlant, parviennent à faire vivre d’excellents dialogues à la rigidité qui serait autrement trop frappante.
Le point fort du film est son efficacité absolue dans la mise en scène qui se crée non par le dépouillement mais par l’expression concise de l’information dans la réalisation. Il surprend par son rapport évident au non-dit et au visuel hérité de l’époque muette. L’utilisation du montage ou des ellipses nous permet difficilement d’imaginer l’intrigue au stade théâtrale sans l'alourdir terriblement. Le film qui date de 1933 (quasiment 10 ans avant Casablanca !) garde de cette façon une jeunesse surprenante.
L’intrigue amoureuse de ce ménage à trois est d'autant plus intéressante que Gilda (Miriam Hopkins), bien au delà d’être l’objet d’un désir lascif, joue la muse capricieuse, une “mother of the arts” symbolique, qui porte le succès à chacun tout en ne pouvant redevenir femme qu’en la compagnie d’un seul. C'est en réalité la véritable force motrice de l'intrigue, celle qui initie les choix auxquels les autres personnages réagissent. Cette absence de résignation, cette liberté dans une histoire amoureuse d'une période pourtant stricte en fait un film résolument moderne.