Basé sur l'histoire vraie de Frank Serpico, jeune flic new-yorkais qui dénonça la corruption généralisée dans les années 70, le film de Sidney Lumet narre cette vocation contrariée, qui se transforme en véritable descente aux enfers pour le personnage principal.
Lumet est un réalisateur qui a toujours ausculté la société américaine à travers ses institutions, dont il dénonça les dérives avec force et talent tout au long de son immense carrière.
"Network" par exemple met en évidence les excès de la télévision, tandis que "Power" s'intéresse aux dessous des campagnes électorales, et que "The Verdict" interroge le système judiciaire.
Avec sa mise en scène toujours sobre et efficace, proche du documentaire (avec un certain faux-rythme qui colle bien à son sujet), le cinéaste aux 45 long-métrages (!) prend soin d'éviter tout manichéisme, à l'image de ce portrait de Frank Serpico, qui n'omet pas les faces sombres du personnage, ne le présentant pas comme un héros infaillible "à l'américaine", mais simplement comme un homme qui doute, hésite, a peur...
Encore à ses débuts, le jeune Al Pacino prête à Serpico ses traits meurtris, sa voix nasillarde et son look hippie-clodo avec un talent immense et un naturel confondant.
Ainsi, la scène finale avec la médaille dans le lit d'hôpital est d'une force émotionnelle remarquable.
"Serpico", c'est une analyse à échelle humaine du phénomène de corruption, pas une dénonciation tous azimuts où les méchants sont punis à la fin.
Un film percutant qui restitue bien l'atmosphère new-yorkaise crasseuse de ces early seventies, avec ses prises de vue effectuées sur le vif dans les rues de la ville.