Rares sont les adaptations réussies de BD franco-belges au cinéma. Seuls ne déroge pas à la règle. Déjà en raison d'une erreur de format. En effet, l'univers de Seuls est bien plus calibré pour une série (genre 5 ou 6 épisodes par saison) plutôt qu'en un long métrage qui en appelle d'autres en cas de succès.
Outre ce problème, Seuls souffre d'un déséquilibre d'ambition. La photo et la réalisation semblent orienter le film vers un blockbuster à la française. A côté de ça, le scénario issu de la BD est dépouillé de toute puissance et de tout rebondissement. De plus les personnages sont outrageusement simplifiés. Avec seulement six personnages il aurait été bon de les développer un peu plus, plutôt que d'en faire des caricatures: le Maître des couteaux est à ce titre un ratage complet, son intrigue étant particulièrement bien trouvée dans la BD. Dodji, personnage ultra charismatique de la BD est ici représenté sous l'identité du jeune de banlieue qui n'est pas si wesh que ce qu'on pourrait croire, accentuant l'opposition assez ridicule avec Ivan, qui ne sert ici qu'à ironiser sur son côté petit bourgeois, là où son intelligence est mise en valeur dans la BD... Camille ne sert à rien, Terry est sous exploité, de trublion ingérable dans la BD, il devient électron libre efficace et sans saveur dans le long métrage. Mais le pire reste le personnage de Saul, fascinant dans la BD, il est ici réduit au rôle de néo-nazi cruel et bas du front. Le côté Sa Majesté des Mouches des temps modernes est complètement laissé de côté au profit d'un résultat tape à l’œil mais qui sonne creux de bout en bout.
Le final semble annoncer une suite qui à mon avis ne verra pas le jour et ce malgré le potentiel indéniable de la BD qui sert de point de départ... Si je comprends la nécessité d'adapter le scénario d'une BD pour la transposer à l'écran, j'ai plus de mal à accepter qu'on retire à l'original toute sa sève et toute son analyse des rapports humains à l'échelle adolescente face à l'absence d'adultes et de repères... C'est plat, putassier, bref c'est raté.