Encore un nouveau Spider-Man ? Un énième film de super-héros ? Parmi la masse de films de ce genre, comment se faire sa place ?
La tâche est ardue, et Sony abât sa dernière spider-carte...


Critique écrite avec ça dans les oreilles :)



Changement de paradigme ?



C'est une réflexion profonde sur la transposition comic book/film qui est entreprise ici. Le concept est à la fois simple et complexe : Miles, notre Spidey se retrouve forcé à intéragir avec les spider-personnes d'autres univers pour vaincre le vil Caïd. Il devra trouver sa voie parmi ses pairs et prouver sa valeur.


La première présentation est faite par Peter Parker lui-même, celui que tout le monde connaît, même les moins initiés. Sa présentation commence par des pages de comics et d'animation 3D classique. Mais quand celle de Miles arrive (notre Spidey central), la caméra effectue un 360° autour de lui pour nous montrer que c'est bien lui que l'on suivra de plus près. On est dans son monde (sa chambre), il écoute sa musique et prépare ses graffiti. C'est le voyage de héros de Miles qui nous intéresse.


La vision de ce film soulève en moi une question fondamentale : vient-on enfin de comprendre pleinement l'essence d'un comics de super-héros dans un film de cinéma ?



#JeSuisSpidey



Spider-man est un symbole. Les comic books, films, dessins animés, jeux-vidéo, fringues et autres sucettes (voir le film pour comprendre) montrent bien à quel point ce petit gars du Queens a conquis le monde.


Chacun, à sa manière, peut s'approprier ce symbole, cet emblème de la pop culture.
A ce titre, cette oeuvre peut être mise en relation avec une poignée de blockbusters récents qui ont une extrême conscience de la figure mythologique qu'il dépeignent. Tout comme The Last Jedi ou encore Logan, ce Spider-man a l'ambition et la tâche ardue de vouloir reconnaître la puissance du mythe auquel il s'attaque tout en lui insufflant un souffle nouveau.
En effet, le film reconnaît l'aura de son propre héros et en joue :
- A l'instar de Logan, les comic books papier existent à l'intérieur de la diégèse du film.
- A l'instar de The Last Jedi (qui termine par des enfants jouant à
Star Wars avec des figurines), Spider-Man et ses dérivés/dérivations sont connus par Miles et le spectateur : le film est très conscient de lui-même.


Dans une scène faisant particulièrement écho à la réalité et aux manifestations émouvantes qui éclosent et rassemblent les gens derrière un symbole commun


, se tient l'enterrement public de Peter Parker.


Tout les habitants portent le masque de l'étendard de New-York. Là, le film nous montre bien que nous avons tous absorbé cette figure, que tout le monde peut être un héros à son échelle, que nous sommes tous Spider-Man. (Autre parallèle avec TLJ, où nous pouvons tous être des jedis)
Comme toutes les grandes figures mythologiques (de tous temps), Spider-Man résonne inconsciemment en chacun de nous, car les thèmes et questionnements humains qui lui sont propres, parlent à notre sensibilité humaine commune : prendre ses responsabilités, grandir, devenir ce que l'on doit devenir, affronter le deuil, se faire une place dans ce monde...
La bande de joyeux lurons qui accompagnent Miles montre toute l'étendue des possibilités d'intégrer cette figure mythologique. Un afro-latino-américain est Spider-Man ! Un pauvre trentenaire raté est Spider-Man ! Un justicier de polars des années 30 est Spider Man ! Une danseuse étoile ! Une japonaise et son robot high-tech ! Un putain de cochon de cartoon !
NOUS SOMMES SPIDER-MAN !



"Allez Chico on met la gomme !"



Ce qui ancre le film comme un film des années 2010 est son rythme : ça va à 100 à l'heure. On fonce, on prend une petite respiration, et on repart de plus belle, constamment !
Mais lorsque l'on prend son temps pour installer une scène, notamment lorsque le père veut retrouver son fils devant la porte de sa chambre, la dissonance de rythme rend la scène encore plus puissante. Une des scènes les plus touchantes de l'année.
Ce rythme effréné, symbole d'une nouvelle ère, paraît impossible à atteindre dans un film live-action. Même en terme d'animation pure, nous avons atteint un nouveau palier !
La présence à la production de Phil Lord (et au scénario) et Chris Miller, réalisateurs de La Grande Aventure Lego (autre parangon de film au rythme complètement fou) est à noter. Ce genre d'animation était impensable il y a encore quelques années, pas moins de 124 animateurs ont travaillé sur ce film.


Détail génial, chaque personnage apporte son propre style, dans l'humour par exemple mais surtout dans les combats. Deux scènes d'action mettent parfaitement en valeur la complémentarité des styles de chacun. La place est faite à chacun d'exprimer son univers, dans deux propositions d'action singulières et complémentaires :
- Le combat chez Tante May démontre tout le talent de mise-en-scène des équipes et toute la liberté que permet l'animation. Un combat de titans se déroule dans une pièce de 20 m² mais jamais nous ressentons le cadre comme une limite.
- Le combat final se déroulant à l'épicentre qui a permis à tous ces héros de se rencontrer bien malgré eux, nous permet à nouveau de passer d'un univers à l'autre. Mais plus le combat avance, plus le sort de chaque héros s'efface, à mesure que le décor se désintègre. Cette fois-ci c'est à Miles de terminer le travail et d'accomplir son voyage de héros.


La pluralité offerte par ces personnages permet d'offrir une effervescence et une émulsion geek quasi-jamais atteinte dans mon expérience de cinévore.



"Je suis le Méchant et je vais tuer le Gentil !"



Vient le caïd, le "gros" méchant de service, physiquement imposant, qui bouffe littéralement l'écran par sa largesse démesurée. Quelques plans On retrouve un vilain, qui par sa simple présence et sa manière de "remplir" le cadre, possède une aura immédiatement malfaisante. On oublie souvent à quel point un physique suffit à créer un méchant. Into the Spider-Verse se paie même le luxe de ne pas vraiment s'attarder sur Kingpin, lui laissant le strict nécessaire en temps à l'écran. Cependant, un court flash-back révélant sa motivation crée ce petit moment de flottement d'empathie qui rend ce bad guy plus complet et moderne.



Les 2010s, années du LOL



Ici, on rit avec les héros, pas des héros. Ils sont tous importants et touchants.
Contrairement à beaucoup de blockbusters modernes, l'humour est finement intégré et élève chaque scène. Chaque moment de "comic relief" continue d'apporter énormément d'attachement aux personnages, si bien que quand le film se veut grave, il l'est encore plus. Oui, j'ai été touché comme jamais devant un film de supers-héros. Oui, la mort d'un personnage secondaire dont la présence à l'écran est très limitée m'a plus touchée que le cataclysme final et la mort de la moitié des héros d'Avengers Infinity War. Tout ceci témoigne d'un savoir-faire et d'une efficacité rarement atteinte.



The one to rule them all



Comment après cette leçon d'adaptation, cette énergie folle, puis-je être tout excité de voir la suite des aventures Avengers ? Comment faire un nouveau Spider-Man après celui-ci ? Comment faire un film de super-héros après celui-ci ?
Comme Heat pour le film policier, comme Shining pour le film d'horreur, comme E.T. pour le film d'aventure... Il sera impossible de ne pas avoir ce film en tête lorsqu'un réalisateur s'attaquera à ce genre. Into the Spider-verse est un game changer, l'apanage de tous les chefs-d’œuvres ?


Spider-Man : Into the Spider-verse met une mandale phénoménale à TOUTE LA CONCURRENCE (y compris Brad Brid et ses Indestructibles !) et je ne suis pas prêt de m'en remettre.
L'adaptation de comics vient d'atteindre ses lettres de noblesses, c'est un comics sur écran que viennent de nous proposer les 3 réalisateurs, ainsi que tous les designers et animateurs du film. Le paradigme n'a pas changé, le paradigme vient d'être défini. WOOOSH

BatBerto
10
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Créée

le 17 déc. 2018

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BatBerto

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