Bien qu'il s'en défende, mais je ne sais pas si on doit le croire, Stardust memories ressemble à un bilan de la première partie de la carrière de Woody Allen, avant son virage plus "auteur". Celui-ci joue un réalisateur fatigué de l'image de comique qu'on lui donne, exaspéré de l'attitude des producteurs ainsi que ses fans, qui ne rêvent que de le voir faire encore et toujours les mêmes films. Il est aussi partagé entre deux femmes ; bref, il vit une crise existentielle.
D'ailleurs, Woody Allen cite souvent ce film comme un de ses préférés, un de ses échecs commerciaux, car il y voit sans doute ce qu'il est à 45 ans. Couvert de gloires, mais au fond, incapable d'avancer aussi bien professionnellement que dans le plan personnel (Diane Keaton puis Mia Farrow). Tourné entièrement en noir et blanc, avec une photo magnifique de Gordon Willis, le film laisse planer une ombre de nostalgie, d'un temps passé. D'ailleurs, on y voit un extrait génial de Frankenstein à la sauce Woody Allen, très proche dans l'esprit de ses films des années 70.
Il est aussi à noter que Woody filme admirablement bien ses actrices, et on le comprend dans son choix difficile entre Charlotte Rampling et Marie-Christine Barrault, toutes deux éblouissantes.
Mais dans ce portrait masochiste que se donne Woody, c'est celui d'un artiste fortement contrarié, incapable de savoir où il veut aller, mais qui, si devrait choisir un véritable amour, serait celui du 7eme art, notamment ce superbe plan final où il se tient devant une salle vide, l'air pensif.
Woody Allen parle de lui, à travers le cinéma, et j'en suis fort touché de la pertinence de cet artiste à se renouveler ainsi, que ce soit dans le style, la mise en scène ou seulement à parler (in)directement de lui.