CRITIQUE // SUNEUNG DE SHIN SU WON
JEUNESSE TORTURÉE POUR UNE RÉUSSITE SOCIALE
Shin Su Won nous dresse ici le portrait d’un système éducatif coréen oppressant et terrifiant. Avant même le début de l’intrigue le décor est planté par une phrase qui s’affiche sur l’écran encore noir. Ce sont les derniers mots d’un lycéen avant son suicide. Dans son message il dénonce une pression inhumaine exercée par un système éducatif oppressant, limitant toute vie sociale, avec pour seul objectif la réussite au Suneung, un examen qui ouvre les portes aux meilleures universités coréennes.
Le terme Suneung est une abréviation en coréen de l’expression suhak neungnyeok siheom qui signifie littéralement test d’aptitude d’études qui est devenu en Corée du Sud l’examen incontournable de fin d’études secondaires qui permet l’accession aux universités d’élites. Cette épreuve décisive ne sanctionne pas seulement un niveau d’études qui correspondrait à notre baccalauréat, mais génère un classement national de tous les candidats. (Contrairement au bac français, il se déroule sur un jour. “Quelque 700.000 élèves de terminale voient leur destin scellé en huit heures d’examen”, explique à l’AFP Shin Su-won)
En fonction de ce classement les candidats peuvent prétendre à entrer dans les meilleures universités, elle-mêmes classées au niveau national. En fonction de leur rang, elles attirent les meilleurs candidats. Les trois plus prisés aujourd’hui sont la Seoul National University, à la Korea University et Ynsei University. Entrer dans une de ces universités permet d’accéder à un réseau de relations proche du pouvoir économique et politique. Ce qui constitue pour tous un facteur d’ascension sociale.
On découvre une lutte impitoyable entre les étudiants qui travaille sans relâche de 7h à 22h.
On voit d’un côté, la crème de la crème : une classe spéciale dédiée aux dix meilleurs élèves dont la présence est remise en cause en permanence par un strict contrôle continu. Puis de l’autre, le reste des élèves travaillant ardemment avec les moyens à leurs dispositions (autant dire pauvres) pour obtenir de bons résultats. Une compétition poussée à l’extrême et une lutte vers la réussite qui prendra des proportions tragiques.
“Tu es 67e. Pour être le premier, il faut en éliminer 66″, cette phrase d’un élève souligne bien le caractère pervers de l’ambiance compétitive dans laquelle ils baignent au quotidien.
D’autres thèmes bien distincts se détache de Suneung, une mère de famille dont les revenus sont modestes, se sacrifiant pour tenter de payer des cours particuliers à son fils, les excès des familles aisés afin que leurs enfants réussissent coûte que coûte, une lutte acharnée de jeunes étudiants prêts à tout pour réussir leur examen et faire partie des 10 premiers au classement général.
Suneung, un thriller déroutant sur les excès du système éducatif coréen et de la manière dont il sacrifie la jeunesse sous couvert d’une réussite sociale illusoire.