Je m’y suis repris à deux fois. A la première vision, certaines maladresses m’ont un peu trop sorti du film. J’ai trouvé le truc pas mal, mais sans plus. Ne faisait que raconter ce que je savais déjà du siège de Sarajevo. Le massacre des civils, le martyre, quatre ans durant, d’une ville entière. Bon.
Me suis tout de même dit que quelque chose clochait. J’avais probablement pas pris le film par le bon bout. J’ai attaqué une deuxième projection.
Alors, j’ai compris. J’ai compris qu’il s’agissait d’une question de point de vue. Je m’étais placé, la première fois, au-dessus, l’endroit d’où l’on nous montre la plupart des films. Mais celui-ci ne parle pas depuis ce lieu. Ce film ne veut pas raconter une histoire, il veut raconter un homme. Paul Marchand, qu’on ne saurait réduire à une profession, fut-elle de journaliste.
Le métrage condense une année de vie à Sarajevo en quelques scènes. L’idée est de montrer la soif de vie du personnage. La vie n’est jamais aussi vivante, qu’à proximité de la mort.
Le propos de ce film donc, c’est de montrer l’élan vital d’un individu, dans son engagement total, dans son intensité la moins supportable. Une personne exceptionnelle, au sens littéral du terme. En fuite. Ou bien, à la poursuite d’un graal inatteignable, dont on ne saurait préciser la nature.
Paul Marchand, sur la corde raide, ne ralentit pas pour prendre ses précautions et assurer quelque avenir. Vivre pleinement l'instant présent élude les notions de passé et de futur. Il accélère donc, pour éprouver les limites, pour se confronter à l’inimaginable, à la vie, à la mort, aux dieux, au destin, à la folie des hommes.
Ce film, sur le fond, et même dans sa forme, se veut la chronique des aventures en enfer du rejeton illégitime du capitaine Achab et de Don Quichotte.