Paul Marchand était un reporter du guerre bien réel, accroc aux conflits et à l'odeur de la poudre et du sang. Il fut entre autres célèbre pour avoir couvert la guerre civile dans les Balkans au début des années 90, dont il tira un livre, adapté via le présent film.
C'est peut-être paradoxal pour un journaliste qui voulait mettre en avant la douleur des autochtones avant la considération pour sa propre profession, mais "Sympathie pour le diable" gagne beaucoup en intérêt grâce à cette représentation de Paul Marchand, incarné avec panache par Niels Schneider.
Provocateur voire frimeur, joueur (y compris avec la mort), cultivant son image iconoclaste avec un cigare cubain greffé à la bouche, ne mâchant pas ses mots et ne lâchant pas ses sujets, déterminé à raconter au monde la souffrance qu'il voit. Un personnage détonnant, qui permet une représentation des contradictions et tentations du métier de correspondant de guerre.
On y voit la limite parfois ténue entre le racolage et la volonté sincère d'informer sur la violence de la guerre. Ou l'impuissance et la frustration de se trouver au coeur du conflit sans pouvoir réellement agir sur son issue.
En prime, le film dresse un portrait général. Evoquant évidemment les dommages envers les civils, la passivité des casques bleus, l'indifférence de la communauté internationale... Le tout dans un style hivernal caméra au poing à la limite du documentaire, avec une photographie grisâtre, très peu de musique, et une violence rare mais uppercut quand elle survient.
"Sympathie pour le diable" est donc un hommage à Paul Marchand doublé d'une réflexion pertinente sur le métier de journaliste. Et une évocation d'un conflit sordide, qui malheureusement n'a pas vieilli (on peut penser à l'Ukraine en voyant les images du film...).