Taram et le Chaudron Magique, le 32e long-métrage d'animation et le 25e "Classique d'animation" de Disney, se distingue dans l'histoire de la firme de Mickey par son parcours tumultueux. Sorti en 1985 et inspiré du deuxième tome des Chroniques de Prydain de Lloyd Chudley Alexander, ce film aura mis près de douze ans à débarquer dans les salles obscures. Avec un budget record de 44 millions de dollars à l'époque, il ambitionnait de redéfinir les standards de l'animation. Cependant, sa réception fut loin des attentes, générant seulement 21 millions de dollars de recettes et mettant en péril l'avenir de la division animation de Disney. Son accueil et sa performance au box-office nous invitent à examiner de plus près les éléments qui composent ce film. Dans ce contexte, la première facette à explorer est sans doute l'ambiance unique et sombre qui le distingue des autres productions Disney.
Une ambiance poisseuse et unique, un méchant effrayant mais gâché
Très rapidement, le film instaure une atmosphère sombre et une ambiance poisseuse qui détonnent positivement chez Disney. Cette noirceur est une bouffée d'air frais dans l'univers souvent très lisse des productions de la maison aux grandes oreilles. Cet effort de différenciation mérite d'être salué pour son audace, même si le reste ne suit pas toujours.
L'un des points forts du film réside dans son antagoniste principal, qui s'impose comme une figure véritablement menaçante et effrayante. Cependant, le traitement de ce personnage et surtout sa conclusion s'avèrent décevants. Sa mort est à l'image de nombreux éléments du film : un potentiel gâché par une exécution qui manque de panache, l'une des plus pitoyables de l'histoire du cinéma d'animation.
Des relations peu convaincantes et des personnages creux
Le film tente d'établir des dynamiques d'amitié entre les héros, ainsi qu'une romance naissante entre Taram et la princesse Eilonwy, mais ces tentatives tombent à plat. Il est difficile de croire à la solidité de ces liens, notamment à cause du manque de développement des personnages et d'une alchimie quasi inexistante. La romance entre Taram et la princesse est particulièrement difficile à saisir, tant elle semble artificielle et dénuée de fondement. De manière générale, les personnages sont tristement creux. Taram, censé être le héros de l'histoire, s'avère souvent agaçant, ses actions étant principalement dictées par une impulsivité peu convaincante plutôt que par une réelle intention héroïque. De plus, la princesse et le ménestrel, qui pourraient ajouter une richesse narrative, sont réduits à des rôles de figuration, leur absence n'aurait guère d'impact sur le déroulement de l'histoire. Seul Gurgi a un véritable rôle, mais encore une fois, celui-ci aurait eu plus d'impact si le développement des liens entre personnage avait reçu plus de cinq minutes d'attention.
Un univers non défini
Un des aspects les plus déroutants de Taram et le Chaudron Magique est son monde : un univers qui semble riche et profond (puisque adapté d'un cycle romanesque !), mais qui est malheureusement sous-exploité. Nous parlions d'une princesse, mais de quoi est-elle princesse exactement ? Les habitants de ce monde restent invisibles, comme si le monde avait pris fin avant l'histoire. Cette absence de contexte et de définition de l'univers érode l'immersion et l'intérêt pour le récit.
Une bande-originale oubliable
La musique, élément habituellement marquant des productions Disney, ne laisse ici aucune empreinte mémorable. Elle accompagne les images sans jamais vraiment s'imposer ni enrichir l'expérience, ce qui est regrettable pour un film d'animation où la bande-son joue un rôle crucial dans la construction émotionnelle.
En définitive, la gestation chaotique de Taram et le Chaudron Magique lui aura été fatale. Le visionnage du film se révèle être une épreuve de patience, où l'on se surprend à vérifier l'heure, signe d'un engagement émotionnel et narratif qui peine à se concrétiser. Malgré une ambiance et un méchant prometteurs, le film souffre d'un manque flagrant de cohésion narrative, de développement de personnage, et d'une immersion dans son univers. Ces lacunes mènent à une expérience cinématographique frustrante, d'où une note finale de 4 sur 10, symbolisant le gâchis d'un potentiel considérable.