À mes yeux, Terminator a imposé James Cameron non pas comme un solide artisan mais comme un conquérant. À peine sorti de son western SF, le cinéaste passe derrière Ridley Scott pour la suite d'Alien. Non seulement il s'y est attaquée avec passion (son style et sa sensibilité transparaissent à chaque séquence) mais il poussait encore la technologie afin de livrer l'un des blockbusters les plus efficaces des années 80. Rebelote avec Abyss qui, en parallèle d'une histoire mêlant fonds marins, guerre atomique et message humaniste, opérait une véritable révolution avec ses effets visuels (le morphing). Bref, le réalisateur dépassait le cadre du conteur né pour devenir celui du démiurge visionnaire. Mais le coup de massue définitif restait à venir avec Terminator 2 : Le Jugement Dernier.
Environ 10 ans après les évènements du premier, nous retrouvons donc les machines venues du futur. Plus déterminées que jamais à en finir avec leur ennemi John Connor, elles envoient le tout nouveau T-1000 dans le passé pour le tuer jeune. De son côté, la résistance expédie un T-800 reprogrammé afin de protéger son futur leader. Une nouvelle fois, la clé de l'avenir dépendra de ce combat...
Gonflé d'un budget hors-norme à l'époque (102 millions de dollars), T2 témoignait d'une volonté de spectacle total où la forme s'allierait parfaitement avec le fond. Indiscutablement, cette suite est une date dans l'Histoire du cinéma.
L'excellence de ses effets-spéciaux impressionne toujours aujourd'hui.
James Cameron nous invite pour un grand-huit de premier ordre. Il décuple l'ampleur de ses scènes d'action (toutes incroyables), notamment grâce aux capacités de transformations ahurissantes de son antagoniste. Loin de les suggérer, T2 les assène comme autant de moments forts qui laissent sans voix et font sans arrêt rebondir l'intrigue. Mais il ne s'agit pas que de techniques.
La force du film repose sur cette maestria à installer ses enjeux, à présenter ses personnages et leurs destinées pour mieux les entrechoquer lors de ses sommets. À ce jeu-là, le metteur en scène est un roi. Le film répète la structure du premier, et on pourrait le lui reprocher si seulement le scénario en modifiait certaines règles. Remplacer le soldat héroïque (Kyle Reese) du premier par un T-800 n'a rien d'un artifice : tout le cœur de Terminator 2 va s'en trouver bouleversé. Si un cyborg a pu nous faire peur avant, il va cette fois générer de l'affect (par le biais de sa relation -magnifique- avec un petit garçon). Et il faut admettre que le résultat est un triomphe de justesse et de poésie.
Ne pas oublier que James Cameron est également un très bon directeur d'acteurs. Arnold Schwarzenegger confirme Terminator comme son rôle le plus important à ce jour. À ses côtés, le tout jeune Edward Furlong fait des merveilles dans les baskets d'un John Connor espiègle et attachant. Sarah Connor n'est pas en reste, loin de là. C'est sûrement avec ce volet qu'elle acquiert le statut d'icône indéboulonnable et s'offre au passage un éventail d'émotions remarquable. Puis enfin, et pas des moindres, le fantastique Robert Patrick qui prend la suite de Schwarzie dans la peau (ou plutôt l'exosquelette) de l'indestructible T-1000. À la différence de son prédécesseur, dont la simple présence physique écrasait toute velléité de résistance, lui jouit d'une aura délicieusement menaçante par sa félinité et sa ruse.
Comme je le disais, T2 est un spectacle ininterrompu, magistral dans ses propositions, généreux dans les ajouts à la mythologie et si bon dans son exécution.
Je garde une toute petite préférence pour le premier, mais Terminator 2 reste un moment phare de ma vie de spectateur. Parce qu'ils sont peu nombreux à avoir pu me faire passer de la peur aux rires, de la tension à l'émotion. C'est un nouveau coup d'éclats pour James Cameron. Et je ne me lasse pas d'en admirer la beauté.