The Dark Angel
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le 2 mars 2022
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The Batman, le film de super-héros parfait ?
La pénombre, quelques notes de piano et une contrebasse bercent nos oreilles alors qu’une silhouette imposante sort de l’ombre. Une nuance de rouge s’accroche à nos rétines et laisse entrevoir la marque à peine visible. La musique s’accélère et s’intensifie, on découvre alors un personnage au regard fermé et déterminé à éradiquer toute la gouape de Gotham. D’une coupe au noir, Matt Reeves nous donne rendez-vous dans la vie torturée de Batman. Et bordel, on a qu’une seule envie : entrer dans le quotidien poisseux et gras de Bruce Wayne malgré tous les coups qu’on s’apprête à prendre dans la gueule.
Avec ce premier teaser en 2020, Alfred se fendrait bien d’un « Arh shit ! Here we go again... ». Mais ce court clip de tout juste 45’’ est si impactant et pertinent que le majordome lui-même s’y ruerait, simplement intrigué par l’état chaotique de la ville en décrépitude.
Les quelques spectateurs qui n’ont pas encore déserté Warner à cause de Justice League et de quatre ou cinq autres films dont je tairai les noms veulent désormais voir The Batman sur grand écran. Si l’attente se fait déjà longue, la crise sanitaire n’arrange pas les choses et voit la sortie du film repoussé pas une, mais deux fois. On en vient même à se demander si le film sortira bien au cinéma. Une semaine avant la sortie du film, l’excitation et la peur se mélangent aux premières critiques annonçant le chef-d'œuvre qui viendrait enfin concurrencer le Dark Knight de Christopher Nolan. Je me revois encore assis dans la salle, tout juste avant le début du film. Les lumières s’éteignent et laissent place à une seule couleur... le rouge, symbolique de la violence, du plaisir, de la colère, de la vengeance...
The Batman est une lettre d’amour aux fans de la trilogie Nolan, aux amoureux de la photographie léchée et aux détracteurs de Marvels. Mais dans le paysage cinématographique hollywoodien contemporain, incarne-t-il le film de super-héros parfait ? Il est fort probable qu’une partie de la réponse se trouve aux côtés de JOKER.
Todd Phillips et Matt Reeves ont réussi à insuffler puis à instaurer un ton et un parti-pris gagnant chez Warner (enfin !). Exit les Aliens, les super-pouvoirs, et le multivers, laissez entrer la tragédie, la violence brute et un réalisme terre-à-terre.
Le film de Reeves brille dans cet exercice, et ce dès les premières secondes. Aucune animation ne nous est présentée pour les logos de la Warner et DC Comics. Le message est clair : vous n’êtes pas là pour voir un divertissement, mais une véritable proposition de cinéma. Dans un univers où la limite entre réalité et fiction n’est jamais très épaisse, The Batman se positionne en tant que lanceur d’alerte sur l’état de notre société, tout comme Athur Fleck en 2019. C’est là, dans leurs intentions scénaristiques, que se trouvent les forces du JOKER de Phillips et du Bat de Reeves. Tous deux revisitent des personnages emblématiques de la pop-culture méprisés par la société actuelle à coup de pancartes et de ciment. « Celui qui se relève est bien plus fort que celui qui n’est jamais tombé. » François Gervais.
Pas de nouvelle origin story pour la chauve-souris. On découvre cependant un personnage jeune, hésitant, ambitieux mais dévoré par la gangrène qui se repend dans les rues de Gotham. Et comme si ce n’était pas assez, le personnage est hanté par des démons qui consument une à une ses influences familiales. Ce n’est pas pour rien que le visage de Bruce Wayne ne nous apparaît pour la première fois, qu’au bout de 25 minutes. Repoussant sa propre identité, le BW de Reeves n’existe quasiment plus, c’est Batman, alter égo, vengeur et bête errante qui a pris le dessus. Sous le masque, la performance de Robert Pattinson ne nous laisse pas indifférents. Passé de vampires douteux à chauve-souris prodigieuse pour les ‘’fans de Blockbuster’’ et dans la lignée de ses incroyables performances pour nous autres cinéphiles, Pattinson casse l’écran, écrase Ben Affleck et titille les chevilles de Christian Bale. En effet, le choix de casting se trouve être d’une grande ingéniosité. Pourquoi prendre un acteur souvent critiqué pour son manque de charisme afin d’incarner un personnage jusqu’ici montré comme un play-boy survitaminé ?
À ses côtés, le reste du casting est tout aussi détraqué que lui. Jeffrey Wright incarne un James Gordon au bord de l’implosion, toujours à se demander s’il n’est pas le seul flic non corrompu de la ville. Paul Dano a la lourde tâche de camper Edward Nashton, alias The Riddler. Une performance remarquable accablée d’une VF vraiment dégueulasse, c’est dommage. Zoë Kravitz (Catwoman) et Andy Serkis (Alfred) sont flamboyants, mais trop peu utilisés pour crever l’écran comme Carmine Falcone et Le Pinguin. Mentions spéciales à John Turturro et Colin Farrell pour deux contres emplois irréprochables. Dérangés, perturbés, irrités, ils incarnent la corruption même de Gotham. Chaque apparition est une claque violente dans la tronche tant leur performance est glaçante.
Et des claques, on en a pris... beaucoup. À commencer par la photographie de Creig Fraser (Dune, Vice) et la mise en scène de Reeves. Flirtant parfois avec le film d’horreur, ils ont réussi à donner vie à Gotham. D’une grande inventivité visuelle, les zones d’ombre et la profondeur de champ sont devenues leurs jouets préférés. On nous offre trois heures d’une imagerie sombre où chaque détail est présent pour vous rappeler que la ville (ou Batman) peut vous sauter à la gorge à tout moment. Un peu, comme le faisait Jon Watts dans Spider-man : No Way Home et sa dernière demi-heure de bouillon CGI dégueulasse.
S’ajoute ensuite la musique de Michael Giacchino. Si les trois thèmes principaux (Batman, The Riddler et Catwoman) sont vraiment puissants et intimidants, quelques regrets subsistent de ne pas en avoir pour Carmine et Le Pinguin. À l’instar de Hans Zimmer et James Newton Howard pour The Dark Knight, la bande sonore principale de Giacchino s’adapte et se module parfaitement à toutes les situations. Elle est d’autant plus impressionnante en sachant qu’elle a été composée avant le tournage du film. Même si elle ne reste pas très longtemps en tête, il y a de fortes chances pour qu’une ou deux notes suffisent à soustraire le titre du film chez le spectateur.
C’est donc le grand retour de Batman en tant que meilleur détective du monde. On oublie ici la testostérone, les altères et les pneus de tracteur pour le mascara noir, une Batmobile tout droit sortie de la casse et quelques gadgets à peine fonctionnels. Avec deux ans d’ancienneté dans le métier, Bruce Wayne ne cherche même pas à être la chauve-souris sympa du quartier. Non, la seule chose que cherche le milliardaire à moitié consumé par son échine morale, c’est la vengeance, la paix et la justice à Gotham. Un cocktail explosif quasi-voué à la destruction de tout ce qui gravite autour de lui.
Parfois un peu mou, parfois un peu vide, le (très) long-métrage de Matt Reeves n’est pas le film de super-héros parfait. Empruntant plus à Seven ou à Taxi Driver qu’à n’importe quel film Marvel ou DC de ces 15 dernières années, il n’en reste pas moins une proposition ultra rafraîchissante et bien supérieure à tout ce qu’on a pu voir dernièrement.
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Créée
le 7 mars 2022
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