Road to Nowhere!
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Par
le 20 juin 2024
38 j'aime
Jeff Nichols choisit de broder l’histoire d’un club de motards à partir d’un livre de photos et d’interviews réalisés entre les années 60 et 70, entre une sorte d’âge d’or déjà sur le déclin et une transformation intrinsèquement liée aux bouleversements et désillusions des États-Unis.
On y suit la rencontre de Kathy et Benny, et la découverte du club inspiré par Marlon Brando et fondé par Tommy, autour duquel gravite un ensemble hétéroclite de gars un peu à la marge. Le réalisateur raconte cette histoire à travers un double prisme, qui augmente la distance par rapport à son sujet. D'une part le récit fragmentaire tel que consigné et capté par le photographe et d'autre part le point de vue de Kathy, partagée entre son amour pour Benny et un regard lucide sur le club. Car le club tel qu'il est conçu dans les années 60 n'est pas encore un gang qui ne vit que par la route. Il semble plutôt constitué de personnes qui sont plus ou moins intégrées dans la société et qui cherchent à s’émanciper d’un quotidien banal et rigide. Comme évoqué par Kathy, il est assez paradoxal de voir un groupe qui se définit comme une forme de rejet du cadre strict de la société créer en son sein un certain nombre de règles encore plus strictes à respecter.
Grâce à un travail de photographie que j'ai trouvé magnifique, le film atteint un équilibre entre une forme d'idéalisation de ce mode de vie et une ambiance profondément crépusculaire. En revanche, peut-être à cause du mode de narration ou par la volonté de rester sur les archétypes que campent les différents personnages (le chef bourru, l’esprit libre, l’anarchiste…), je trouve le traitement du club reste assez superficiel. Le personnage de Kathy et son analyse sont beaucoup plus intéressants. Son personnage est le plus riche du film alors qu’elle-même s'estime à la marge et qu'on connaît finalement très peu de sa vie en dehors de ce qu'elle raconte du club.
Ainsi, si j'ai beaucoup aimé le jeu de Jodie Comer, la réalisation, la photographie et le rythme du film, celui-ci manque de quelque chose. The Bikeriders se retrouve au piège de son propre concept : une image de papier glacé, avec des visuels forts mais désincarnés, trop évanescents. Les codes parfois ridicules observés par le club sont très peu questionnés, et le basculement de l'Amérique dans les années post Vietnam n'est que trop effleuré. Les dernières scènes restent ainsi énigmatiques, le film comme le réalisateur restant dans une posture d'observation trop neutre.
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Créée
le 6 juil. 2024
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2 j'aime
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