Les poncifs auraient besoin d'un bon ponçage
Voilà un film comme on les aime. Un film qui s'engage et qui prétend nous apprendre la vie à nous pauvres neuneus tout en maniant le poncif comme une Winchester. Du Florent Brunel cinéaste.
Ainsi on sera ravi d'apprendre que dans le méchant monde du méchant capitalisme, s'enrichir implique de virer ses salariés. Déjà en partant c'est pas super intuitif comme démarche.Dans mon cas, en ayant commencé par n'embaucher personne je me dis que je devrais être démesurément riche. Hein ?, non ?, t'es sûr ? Ben merde alors !
Et encore, on ne peut pas se permettre de se débarrasser de n'importe quels salariés ! Ce serait trop facile de foutre à la porte les baltringues, les balayeurs, les mauvais, les enfonceurs de portes ouvertes et les branleurs qui passent leur journée sur SC. Non. Pour gagner du pognon, il faut dégager les décideurs, les stratèges, les tauliers, sans oublier les mecs qui ont des contacts et du bagou, ceux qui vendent tes produits comme des i-phones.
Impitoyable comme logique...
Jusque là c'est somme toute facile. Pour corser un poil la difficulté, on apprend qu'il faut réaliser l'exercice avec style. Figurez vous qu'à l'instar de phares contemporains du bon goût comme Carmaggedon, les actionnaires de multinationales accordent des points bonus si l'on parvient à compléter l'une des figures suivantes :
- Lourdage ninja avec surprise totale, ton carton est déjà rempli, merci d'être passé, t'es dehors dans 5mn sans pouvoir dire au revoir aux potos : +100xp
- Lourdage destructeur conduisant au suicide : +1,000xp
- Lourdage machiavélique annoncé par la DRH que tu sautes à tes heures perdues : +1,000,000xp
Bon c'est pas tout. Une fois la fortune empochée, le capitaliste avisé qui ne pense qu'à ramasser de l'oseille s'empresse d'aller claquer tout son magot dans une statue à sa gloire, un truc parfaitement improductif tel qu'un building à la con. Et là bien sûr ces imbéciles d'actionnaires sont tout sourire. Imparable !
Quant au héros ruiné, ayant finalement renoncé à son statut de parvenu en résiliant son abonnement au club de golf local, il retrouve sa dignité perdue et se réalise pleinement dans sa nouvelle vie de manœuvre de chantier.
Putain c'est beau comme du Mozart !
Parce que, oui, pour ceux qui l'ignoraient encore, les entrepreneurs du bâtiment ne sont pas des salopards qui se tirent toujours au milieu des travaux, des margoulins qui surfacturent et ne respectent jamais leur devis, des peigne-culs qui bossent comme des cochons, non !!!
L'entrepreneur du bâtiment est un mec juste et droit parce qu'il travaille de ses mains et qu'il se lève tôt le matin. C'est comme ça. Rien à voir avec les maudits traders qui travaillent avec un téléphone et se rentrent tard le soir.
Devant la toute fulgurance de cette pensée, je m'en vais sur le champ balancer mon clavier au feu et le remplacer utilement par un marteau et des clous.