The Dirties
6.8
The Dirties

Film de Matt Johnson (2014)

Lorsque l'on aborde un enchaînement de premières scènes aussi brouillonnes, on ne peut que se demander si la suite va arriver à nous convaincre et nous transporter vers un au-delà, vers un sursaut qu'on ne verrait pas poindre. The Dirties est de ces films qui n'en ont pas l'air. Il est de ces expériences sur lesquelles on peut difficilement mettre le doigts sans se retrouver par mégarde englouti des pieds jusqu'à l'épiderme.


C'est sans conteste une des séances de cinéma les plus surprenantes de ma vie, sans exagération aucune.


Filmé comme un faux documentaire, The Dirties évoque la vie lycéenne de deux jeunes types, Matt et Owen. Bien qu'étant deux opposés sur le spectre de la personnalité, Matt apparaissant comme vif, par trop rêveur quand Owen s'avère d'avantage terre à terre, cela n'empêche en rien le duo de pulser sous le prisme d'une passion commune comme seule échappatoire : le cinéma. Ne se contentant pas de le regarder, Matt et Owen l'agissent en tournant le projet qu'ils ont tant à cœur ; un film dans lequel deux flics joués par eux mêmes vont s'en prendre à un gang de délinquants surnommé The Dirties. Par là nos deux attachants protagonistes vont chercher une revanche face au harcèlement qu'ils subissent chaque jour en classe. Entre fiction par le média filmique et réalité adolescente (se confondant parfois l'une et l'autre), notre film et nos héros vont, à leurs manières, tenter de vivre pour l'un, survivre pour l'autre. Et je n'en dirai pas plus...


The Dirties, bien que transpirant le buddy movie par tous les pores avec son cabas rempli à ras-bord de moments absolument hilarants est plus, apporte plus. Il offre un regard nécessaire sur la tragédie adolescente ainsi qu'un rapport entre réalités plus que pertinent pour ne pas dire terriblement puissant. La réalité se veut de ce fait altérée par une vision cinématographique personnelle, singulière. Lorsque, par exemple, nos deux compères rendent un travail en classe sous la forme d'un petit film, la réalité de l'œuvre, son originalité face à la masse, tout cela va se heurter d'une part à la vision restrictive du professeur, agissant comme un producteur sabrant le politiquement incorrect et d'autre part au public, à la somme des étudiants qui vont juger sans vraiment voir, détester et moquer sans vraiment chercher à comprendre. On est à la fois en plein dans la question du harcèlement comme celle du cinéma : la singularité dévorée par la norme, une double langue en somme.


Il y aurait tant à dire sur cette expérience, dans la façon qu'elle a de vous surprendre avec un rire qui meurt petit à petit en un épais malaise, dans ces moments tristes mais nuancés du quotidien, dans cet achèvement monstrueux qui tord le ventre et écarquille l'œil sans pour autant l'humidifier. Il y aurait tant à dire mais à la place je préfère taire certains éléments et vous sommer d'aller visionner The Dirties. Je vous somme d'aller le voir pour sa justesse, sa moralité très éloignée des sentiers battus, pour les bienfaits qu'on en retire et les méfaits que l'on garde comme autant de mises en garde.


Réalité, quand tu nous tiens, j'en viens à te filmer. Réalité, quand tu ne tiens plus, mon regard s'égare et c'est générique de fin.

Créée

le 9 févr. 2017

Critique lue 706 fois

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Fosca

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